critique &
création culturelle

Éclats Sonores
au Fifty Lab 2023

Du 15 au 17 novembre, le Fifty Lab, festival de musique célébrant la créativité des artistes émergents, était de retour pour sa quatrième édition. Entre programmation léchée, nouveaux formats et surprises, retour sur les temps forts d’un festival effervescent et résolument avant-gardiste.

Toujours aussi captivant et pointu, le Fifty Lab sévit depuis 2019 et revient cette année avec le même concept : proposer une foule d’artistes émergent·es choisi·es par les programmateur·ices de 20 festivals internationaux. Essaimés dans cinq lieux emblématiques du centre de la capitale – l’Ancienne Belgique, le Bonnefooi, le Beursschouwburg, Bourse beurs rooftop et le Café Delune ‒ ces showcases s’adressent à tous les curieux·ses et avides de nouveautés.

Mercredi, sur les chapeaux de roues

Premier soir ‒ munie de mon pass 3 jours, j’ouvre les festivités avec un groupe qui m’est familier : Jean Paul Groove. Après un premier coup de foudre détonnant aux dernières Nuits Bota, je trépigne d’impatience de revoir cette joyeuse formation. Et bonne nouvelle : le charme opère une seconde fois à l’AB Club. Le set est court mais intense, de quoi réveiller la foule et se dégourdir les jambes comme il faut pour le reste de la soirée.

La suite de mon programme me mène sur le toit de la Bourse, fraîchement rénovée, offrant une vue panoramique de la capitale. Là nous attend Bobbi Lu, nouvelle tête de la scène électro indie, qui nous surprend avec un show puissant. Entre néons rouges, intrigante superposition de synthés et voix singulière, la jeune artiste anglaise captive l’assemblée avec maestria. C’est à la fois doux et fort, novateur et familier, à la croisée de plusieurs références de qualité. De quoi transcender toute une salle hypnotisée/pendue aux lèvres de l'artiste. On salue le joli travail sur « Zoo Interaction » et le désormais bientôt tube « Metapwhore » que je ne saurais trop vous conseiller pour romantiser vos soirées d’automne.

Suite et fin de cette première soirée sur des notes punk avec Deijuvhs. Accompagné d’un DJ masqué qui aura passé le concert à créer des pogos pour mon plus grand plaisir (non) et d’un batteur tout aussi survolté, l’artiste anglais nous met une claque. Ici pas de faux-semblant, un esprit rock sur le fond et la forme, quelques blagues bien senties entre deux chansons, de quoi faire une clé de bras à Morphée en rentrant.


Jeudi, entre énergie et volupté

Deuxième soir, quasi déjà nostalgique du festival, je mise cette fois sur deux propositions musicales. En premier lieu, je me rends au Beursschouwburg pour assister au show de LũpaGangGang. Le quatuor ouvre les hostilités avec un set maîtrisé et très dansant qui me séduit instantanément. Voguant sans difficultés entre expérimentations vocales et jazz funk instrumental, le groupe dégage une énergie solaire résolument contagieuse, en somme une très jolie prouesse.

Quelques accolades rapides et une dernière rasade de maté me séparent de ma seconde halte ; je me presse afin de retrouver le toit de la Bourse pour le concert de Zedie. Son prénom, originaire du peuple Epie-Atissa et qui signifie « Attends, et tu verras », en dit long sur le chemin qu’il trace. Avec sa voix de velours, des textes en français faussement naïfs et des compositions toutes plus gourmandes les unes que les autres, Zedie fait la part belle à la pop francophone contemporaine pour notre plus grand plaisir. Tour à tour mélancolique, espiègle ou chafouine, sa présence scénique impressionne tant il a l’air à l’aise et à sa place. Enfin, et puisqu’une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, son premier morceau sort en décembre. Risques d’addiction à prévoir…

Vendredi, bouquet final

Fin de festival rimant avec fin de semaine, je suis comme qui dirait prête à (quasi) tout donner pour ce dernier soir. Soirée où le don d’ubiquité me serait d’ailleurs bien utile, tant j’ai du mal à choisir par quoi commencer. Mon choix se portera finalement sur le concert du talentueux Dorian Dumont. Pour l’occasion, le claviériste de Echt! réinterprète le répertoire d’Aphex Twin au piano, confrontant ces deux mondes qu’a priori tout oppose. Carré, senti, subtil et merveilleusement réussi. Pour les intéressé·es, il démarre une tournée européenne très prochainement et devrait faire une halte à l’Ancienne Belgique le 6 mars. 

Direction le Bonnefooi pour le second volet de ma soirée aux commandes de NMSS. DJ et producteur français résidant à Bruxelles, il a notamment fondé son label Flat Earth records et mixe régulièrement chez Kiosk Radio. Électronique, éclectique et avec une palette colorée, la musique de NMSS est tout simplement faite pour danser librement et se laisser porter. Son set fait décidément monter la température, ce qui n’est jamais de trop en plein mois de novembre.

Enfin, mes déambulations mèneront à un autre hotspot : le concert de Phelimuncasi au Café Delune.
Depuis 2012, le trio sud-africain dépoussière la dance music. Les chanteurs Malathon et les jumeaux Makan Naka et Khera modernisent le Gqom, la « techno-taxi », en l’imprégnant de toyi-toyi, ce chant zulu utilisé lors des manifestations anti-apartheid pour intimider les forces de l’ordre. Sur scène et dans la salle, l’énergie est folle. J’en ressors presque vacillante, car au-delà du dancehall hybride, l’engagement politique du groupe teinte la proposition musicale d’une couleur puissante et dont l’image restera gravée un long moment.

Les forces du festival 

Le Fifty Lab festival incarne une convergence exceptionnelle entre le professionnalisme et l'accessibilité, offrant une plateforme où les passionné·es de musique et les acteur·ices de l'industrie se rencontrent. Avec des événements comme la masterclass captivante de Mehdi Maizi et une tarification raisonnable qui rend les showcases au cœur de Bruxelles accessibles à beaucoup, le festival s'impose comme un lieu d'échange et de découverte. En cette ère de saturation sonore, le Fifty Lab se démarque par sa capacité à orchestrer une expérience musicale unique grâce à une curation soigneusement élaborée. En somme, cet événement représente bien plus qu'une simple rencontre musicale : il incarne une exploration, une immersion au cœur de la diversité musicale contemporaine, offrant à chacun·e la possibilité de se laisser surprendre et séduire par de nouvelles sonorités.

La prochaine édition est prévue du 13 au 17 novembre 2024, pour rester au courant de la programmation rendez-vous sur FiftyLab.eu