critique &
création culturelle
La chute, cette belle envolée ,
le phœnix renaîtra de ses cendres

Dans ce premier roman, l’auteure belge Amélie Dieudonné aborde de façon très intime l’expérience du burn-out.

Fraîchement diplômée en psychologie à 26 ans, Elia a tout pour être heureuse : une histoire d’amour passionnée avec « Greg », son job de psychologue à « La Tanière » (institution qui recueille des enfants placés par le juge) pour lequel elle porte tant d’espoirs , des amis et une famille qui l’entourent… Pourtant, son quotidien en apparence si joyeux vole peu à peu en éclats et elle fait face à la désillusion dans ce travail dévastateur, son couple s’étiole et les normes imposées par la société l’étouffent. Ce récit nous dépeint la lente descente aux enfers d’Elia qui ne parvient plus à trouver sa place et qui sent en elle la flamme s’éteindre petit à petit.

Bien que l’auteure insiste dans la préface sur l’aspect romancé du récit, elle précise également qu’il est inspiré d’un épisode de vie particulier et on remarque un caractère autobiographique et psychologique très présent. L’héroïne et l’auteure se rejoignent et se superposent dans ce roman que l’on ressent comme un exutoire pour Amélie Dieudonné. Les émotions ressenties par Elia sont décrites avec tellement d’intensité et d’exactitude que l’on a souvent l’impression de lire un journal intime. Bien que cela puisse avoir un côté un peu voyeur par moments, cela nous permet de comprendre de l’intérieur les sentiments du burn-out et aussi de les distinguer s’ils apparaissent chez certaines de nos connaissances. Du désarroi à la colère en passant par la tristesse et l’abattement, l’auteure ne nous cache rien de cette période difficile, en décrivant des émotions très vives.

Le style d’écriture est lui aussi atypique et participe à l’harmonie globale du livre. En effet, on retrouve de nombreux allers-retours dans le temps ainsi que des changements fréquents de voix narrative avec pour résultat une alternance de passages à la première puis à la troisième personnes. Bien que ces procédés rendent permettent de montrer la chute progressive d’Elia, cela donne parfois un côté imperméable et confus au récit, ce qui rend la lecture difficile lors de certains passages.

Amélie Dieudonné n’hésite pas à mettre en lumière le schéma type imposé par la société qui peut souvent mener à des burn-out ou même des dépressions. Elle nous met en garde au sujet des pressions extérieures et malgré, le côté triste du récit, elle transmet un message positif. En effet, le roman se termine sur une bonne note qui pousse à trouver son propre équilibre, sans forcément suivre des voies toutes tracées. Ce roman débute dans les cendres et se conclut sur l’envol d’un phœnix resplendissant.

Je sens mon corps libéré, mes mouvements sont amples et retrouvent de la souplesse. J’ai quitté le carcan qui m’enserrait la gorge jusqu’à l’étouffement. Le carcan qui me privait d’espace. Le carcan qui me privait de m’exprimer, d’être moi-même… Plus jamais je n’accepterai cet enfermement. Je serai moi-même, toujours. Je ferai ce qui me plaît jusqu’à ce que cela plaise aux autres. Et non plus l’inverse.

Même rédacteur·ice :

La chute, cette belle envolée

Amélie Dieudonné
Éditions l’Harmattan, 2019
126 pages