Premier roman de l’auteur belge Philippe Gustin, Sous la ceinture est un ouvrage crissant d’humour. Il a reçu en 2020 le Prix Fintro de l’Écriture noire. Sa thématique : le terrorisme, un sujet aussi brûlant que les mots de l’écrivain.
Khalid est ingénieux, un avant-gardiste de la profession qui ne cherche qu’à ce que son œuvre soit revendiquée. Alors passer inaperçu face aux suprémacistes et aux écolos dans la joute de l’attentat parfait, ça le frustre. Evelyn, New-Yorkaise de 35 ans et nouvelle Spécialiste de la Gestion des Programmes au Bureau de lutte contre le terrorisme de l’ONU, a quant à elle bien l’intention de donner un coup de neuf sur le plan anti-terroriste de l’organisation internationale. Les personnages de Philippe Gustin sont vivants, il leur tire le portrait et laisse ensuite le lecteur les découvrir à travers les pages. Sans nous identifier à eux, nous connaissons Khalid le djihadiste au ventre bedonnant et Evelyn la fonctionnaire américaine à la répartie cinglante.
« Trente-cinq ans plus tard, Evelyn Bright avait conservé un bon gros derrière qui avait amorti quelques coups de reins. La dioptrie de ses verres rendait son regard inquisiteur tandis que ses cheveux coupés court lui conféraient une allure volontaire. Si son physique n’était pas déplaisant, son tempérament était moins engageant.
Car Evelyn foutait les jetons. Furieusement intelligente, elle ne mettait jamais longtemps à trouver le défaut de la cuirasse ou le bon angle d’attaque. Personne n’emmerdait Evelyn Bright. »
Les mots de l’auteur sont aussi tranchants que la répartie de son personnage. Un vocabulaire familier, cru voir vulgaire habille tant les dialogues que la narration. Les choses sont dites telles qu’elles sont, comme on dit souvent. Une écriture sans filtre, mais pas dénuée d’humour. Malgré le sujet sombre et dramatique, Philippe Gustin ne manque pas de le tourner en une dérision bienvenue. Loin de dédramatiser les attentats, l’écrivain s’introduit dans le quotidien et dans la tête de ceux qui les organisent et les combattent. Pas de larmes des familles de victimes, pas de descriptions détaillées de scènes d’horreur, ni d’émouvant hommage national. Le terrorisme, sans la terreur.
« Combattre la terreur par le ridicule… ça, c’était une putain d’idée ! », une idée qu’Evelyn Bright a débusqué dans une fable dans laquelle deux enfants échappent aux crocs d’un loup. C’est en les humiliant que l’Américaine impose un demi-tour aux terroristes, la queue entre les jambes. Pour cela, Khalid et ses comparses sont malgré eux renommés « shorties ». Ce mot se voulant rabaissant, fait aussi allusion à la taille de l’attribut des criminels, étonnamment court . Poupées pour enfants et slogans dégradants ont vite fait de tourner en dérision ces assassins au petit doigt.
Sous la ceinture est le premier roman de Philippe Gustin, né en Belgique en 1974. L’auteur ne manque d’ailleurs pas de nous rappeler qu’il vient du plat pays, notre culture contemporaine étant très présente dans le texte, entre références et lieux clés : un Bruxellois se sent chez lui dans ce livre. Diplômé d’un master en langue et littérature françaises, l’écrivain de 46 ans travaille en tant que cadre commercial dans le secteur du bâtiment. Un nouveau personnage dans le secteur romanesque, à garder à l’œil.
Philippe Gustin a mérité son prix avec Sous la ceinture, écriture noire mais pas que. Piquante, humoristique, crue, remplie de personnages vivants. Entre attentats ratés et poupées au zizi raccourci, chaque camp avance son pion et nous offre un roman qui a du mordant.