critique &
création culturelle
Halka
La force du métissage

Du 20 au 22 décembre aux Halles de Schaerbeek, quatorze artistes marocains, acrobates et musiciens, ont amené le spectateur à découvrir un pan de leur culture dans un spectacle riche en couleurs et en envolées.

Trois espèces bondissent : les chèvres, les singes et les chleux.

Halka est une création collective du Groupe acrobatique de Tanger. Dans le langage courant, le halka est un spectacle populaire et festif qui se déroule sur la place publique. Les spectateurs y sont réunis en cercle autour d’artistes, gardiens de la tradition orale. Dans le spectacle homonyme présenté aux Halles de Schaerbeek, l’invitation à la fête abaisse la frontière entre la scène et la salle. Les chants, les danses, les acrobaties spectaculaires et les multiples ruptures sont autant de moyens d’emmener le spectateur au cœur même de la représentation.

Halka est un spectacle généreux et énergique, tant dans le fond que dans la forme. Ainsi sont évoquées plusieurs problématiques : la confrontation du passé et du présent, la lutte sociale, la femme et le pouvoir, la disparition d’un lieu emblématique, les rapports humains… Plutôt que de défendre une pensée ou prendre clairement parti, Halka expose donc un patchwork d’idées plus ou moins révolutionnaires.

La force de Halka provient plutôt du solide tissage entre coutume et invention.

Sa force provient plutôt, selon moi, du solide tissage entre coutume et invention. Prenant racine dans de fortes traditions circassiennes de l’Est du Maghreb, le spectacle se déploie dans des procédés propres à la scène contemporaine. Les enfants de Sidi Ahmed Moussa, comme ils se désignent eux-mêmes, parviennent à s’emparer des origines du cirque marocain pour créer de toutes pièces un spectacle loin de tout folklore ou de la vulgarisation du patrimoine.

On y retrouve plusieurs figures emblématiques de leur histoire. La pyramide humaine, par exemple, déclinée sous toutes ses formes, est d’origine guerrière : elle servait à franchir des murailles ou encore à repérer d’éventuels brigands lors des longues traversées marchandes, les caravanes. Les acrobaties circulaires sont également typiques des pratiques circassiennes du Maroc et hantent le spectacle.

Enfin, l’utilisation à la fois visuelle et sonore des jefna , barils employés par les femmes pour faire la lessive et depuis peu utilisés par des musiciens traditionnels (entre autres), est également une belle alliance entre culture et création.

Symbole d’énergie, de collectivité et de rencontre, le spectacle prend sens dans la programmation générale des Halles de Schaerbeek, axée sur l’ouverture à l’autre et au monde. Puisse le Groupe acrobatique de Tanger s’enrichir au gré de ses voyages et affirmer son propos sur la scène internationale.

https://www.youtube.com/watch?v=de7gQQKvxqo

Même rédacteur·ice :

Halka
Créé par le Groupe acrobatique de Tanger
Amal Hammich, Mohammed Hammich, Najwa Aarras, Mohamed Takel, Ouahib Hammich, Hamza Naceri, Mohammed Achraf Châaban, Abdelaziz El Haddad
Création musicale de Xavier Collet
Collaboration en acrobatie marocaine avec Mohammed Hammich (le père)

Vu le 20 décembre 2016 aux Halles de Schaerbeek

Plus d’infos sur le Groupe ici .