Les Nuits 2016, Cirque Royal, jeudi 19 mai. D’abord un Radio Elvis plus noise que prévu, puis un Nicolas Michaux plutôt soporifique. Enfin, Feu ! Chatterton, presque irréprochable.

Bah, c’était très bien exécuté. On a eu droit à des versions longues pour certains morceaux, à un son propre et limpide et à une scénographie1 plutôt bien pensée. Le cercle dessiné par la formation a du bagou, représentant d’une démence contenue et circonscrite, dans laquelle Arthur s’installe dès les premières mesures.

Il mène. Il habite l’espace, pose une ambiance et impose sa personnalité. Il relèguerait presque les autres musiciens au placard, mais il s’applique à ne pas trop en faire. Tout reste maîtrisé et contenu. Quel garçon sage et mesuré, maintenu par une attitude qui respecte son image de dandy maudit. C’est la force de Feu ! Chatterton, une personnalité centrale qui symbolise le potentiel du quintet, sans en devenir l’incontournable attraction. Quelquefois, une pluie de cordes blanches lui souligne la silhouette ; la scénographie veille cependant à ne pas l’extraire systématiquement du groupe.

Pochette du disque, Ici le jour (a tout enseveli)
Pochette du disque Ici le jour (a tout enseveli)

Mais si le contenu est riche, le contrôle permanent offre un spectacle trop sérieux à mon goût. Il m’a manqué ce lâcher-prise, cet oubli de soi et cette inconstance qui rendent un spectacle vivant plus humain.

Tout a l’air d’être étudié, les adresses au public semblent être redondantes de prestation en prestation. Le pacte est, cela dit, respecté : les attitudes fantasmées du dandy sont convoquées ; on assiste à un moment de « poésie raffinée », à une « déclamation poétique », à de longues tirades aussi maudites qu’amoureuses, au concert d’un « groupe de rock français à part ».

Mais je venais aussi pour me sentir concerné. La propreté du son n’a selon moi pas transmis la folie inhérente à certaines chansons. Celle-ci a donc stagné en surface, comme une idée qui gonfle inconsciemment la prestation, mais qui ne devient jamais palpable. Il a fallu attendre Boeing et la Malinche pour atteindre cette démence inespérée. À force de maîtriser, ils en avaient presqu’oublié de s’oublier.

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Feu ! Chatterton
Ici le jour (tout est enseveli)
12 titres
Universal Music


  1. Et pourquoi ne pas avoir davantage pensé les lumières en fonction des textes ?