Pop, c’est son surnom, ça vient de « Pop song », mais son vrai prénom, c’est Stella. Stella, comme la bière, mais surtout comme les étoiles. Pop, elle aime laisser sa tête voyager dans les étoiles, mais elle revient vite sur terre pour comprendre le monde qui l’entoure. En fait, ce qui l’interpelle surtout en ce moment, c’est l’univers des adultes. Ce n’est pas très étonnant, l’environnement dans lequel Pop grandit est un vrai terrain de jeu pour cela. Ses parents tiennent un bar, « La Boule de feu ». Là-bas, il y a des tas d’adultes à observer, des tas de conversations à écouter et à essayer de comprendre.

En tant que lectrice, je me suis très rapidement attachée au personnage de Pop. Je pense que cela commence dès que l’on porte le livre dans ses mains et que l’on voit son magnifique portrait en couverture. On se plonge alors rapidement dans le roman et notre attachement à la jeune Stella ne fait que croitre au fil des pages.

Les lecteurs et lectrices qui ont grandi en Belgique pourront s’identifier à Stella grâce aux souvenirs que l’autrice ravive en nous. On assiste au moment où elle découvre le secret de Saint-Nicolas, la galette des rois à l’école, les galettes du Nouvel An, la construction de cabanes dans les bois... La manière dont Sophie Museur décrit ces traditions de beaucoup de  familles belges nous plonge dans nos souvenirs d’enfance. On ressent les odeurs des gaufres bien chaudes, notre cœur s’accélère à chaque bouchée de la galette des rois dans l’espoir d’obtenir la fève, on ressent l’air froid des instants en forêt… Personnellement, un passage du roman, qui est probablement passé inaperçu pour beaucoup de lecteurs et lectrices, m’a directement fait retourner en enfance. Pop rentre de l’école et boit un chocolat chaud avec des tartines au beurre chez ses grands-parents avant de faire ses devoirs. Le chocolat chaud-tartine était une vraie tradition chez mes grands-parents après les grosses journées à l’école. Lire Pop m’a fait revivre ces souvenirs et les sensations réconfortantes qu’ils m’apportaient. Mais il ne faut pas spécialement avoir grandi en Belgique pour s’attacher à Pop, car ce sont surtout des sensations universelles de l’enfance qui sont décrites.

Ce qui rend Pop plus attachante encore, c’est sa manière de vouloir comprendre le monde qui l’entoure. Un monde rempli d’adultes qui utilisent parfois des mots compliqués et qui ont l’air de ne pas être d’accord sur tous les sujets.Pop analyse, enquête et tente de les comprendre, toujours avec son dictionnaire à la main. Par exemple, sa famille est athée et pourtant, Pop veut découvrir les autres religions. Elle file alors vers la lettre M du dictionnaire pour s’informer sur les mosquées où se rendent certains de ses amis. Malheureusement, en se renseignant autant sur le monde des adultes, on découvre parfois des réalités difficiles qui nous éloignent progressivement de l’enfance et vont parfois jusqu’à nous révolter. Durant son parcours à travers ce monde, Pop découvre notamment les discriminations sociales, l’intimidation ou encore le racisme. La candeur de l’enfance laisse progressivement place à des sentiments moins doux tels que la rage. « Pop n’a pas la fièvre, elle a la rage. » Ce parcours initiatique dans le « monde des grands » est un des points forts du livre car il nous ramène à nos propres cheminements et aux questionnements auxquels on a pu faire face plus jeunes, mais auxquels on est encore bien souvent confrontés. Il rappelle ces moments qui noient l’innocence de l’enfance dans les flots de la vie sans qu’on y  soit forcément préparés : « Son corps grandit, mais sa tête n’est pas prête. »

Si le récit de ce livre m’a tant séduit, je pense que c’est aussi lié à la qualité de sa narration. Pop est le premier roman de Sophie Museur mais son style d’écriture est très abouti. L’autrice, ayant évolué dans le théâtre et le cinéma, parvient à nous emporter dans des décors simplement avec sa plume.  Cette comédienne et metteuse en scène entre dans notre imaginaire pour nous faire voir et ressentir l’atmosphère du récit. Cela passe par le judicieux choix des mots mais aussi et surtout par le maintien du style oral à l’écrit. Sophie Museur laisse les personnages parler à leur manière. Par exemple, un des grands pères de Pop est polonais et l’autre wallon. Tous deux ne parlent pas le français des manuels et cela se ressent dans la lecture puisque l’autrice rédige des phrases dans leur langue à eux. Elle va même jusqu’à en traduire certaines dans un lexique à la fin de l’ouvrage. Au-delà de ces traductions, le style oral se trouve aussi dans les nombreux dialogues présents dans le livre, on se sent alors d’autant plus dans l’histoire. Le chapitrage aide également, selon moi, à rester accroché au récit. En effet, les chapitres ne sont pas trop longs mais renferment tout de même chacun une histoire, nous ne sommes pas coupés dans notre élan de lecture et cela aide à avoir envie de la poursuivre.

Pop de Sophie Museur est si envoûtant qu’il n’est pas simple de s’en détacher, tant la sincérité de ses personnages captive le lecteur. Il s’agit du premier livre de l’autrice qui vient du monde de la scène. En refermant cet ouvrage, une idée me reste en tête. Celle d’une adaptation de Pop au théâtre. En espérant que celle-ci se concrétise.