critique &
création culturelle
« Vous préférez la vie sans vase fongique »
Science-fictions de Selma Alaoui

Quoi de mieux pour revenir au théâtre après une longue absence qu’une pièce qui réfléchit intelligemment à notre société par le biais d’une civilisation future, le tout avec un humour bien dosé ? Ç a s'appelle Science-fictions et c'est en ce moment au théâtre Varia à Bruxelles.

Une scène plongée dans le noir, et malgré un titre futuriste, pas d'éléments qui évoquent une planète hi-tech dans le décor. Devant nous, le lieu représenté est indéfinissable, et semble à la fois être un coin de nature, avec un point d'eau et de la végétation autour, et en même temps des ruines urbaines, avec une cabane (un ancien abribus?) et le béton qu'on peut apercevoir sous la mousse. Quatre personnages, deux femmes et deux hommes, s'affairent sur la scène, habillés dans des tenues pratiques. L’intrigue se joue environ cent ans après notre époque, autour de ces quatre personnages qui se réunissent à la tombée de la nuit, pour visionner des « archives ». Ces archives sont en fait des extraits vidéo d'un film de science-fiction datant de notre époque, que les protagonistes projettent grâce à un petit matériel électronique qu’ils ont bricolé, seul semblant de technologie qu'ils semblent posséder. Ils installent leur matériel en chuchotant, et on comprend donc qu’ils n’ont pas le droit d’être là et de projeter ces extraits de fiction sur le mur.

À travers ces extraits de film, les personnages essaient de comprendre le passé de leurs ancêtres, dont ils ne connaissent que quelques bribes à travers la tradition orale. Leurs suppositions sur notre société sont parfois erronées, et l’ironie dramatique (le fait que le spectateur en sache davantage que le personnage) fait tout l’humour de la pièce. On rit avec les personnages, mais on rit jaune des absurdités qu'ils pointent dans nos comportements, et on se compare à cette civilisation qui semble s'être débarrassée des différences de genre, d'une masculinité toxique, de la cruauté envers les animaux, ainsi que de la notion de travail et d’argent.

Inspiré des écrits de l'Américaine Ursula Le Guin (1929-2018), Selma Alaoui crée une pièce qui représente un futur utopiste, plus favorable pour notre humanité, pour nous faire réfléchir sur notre société. À aucun moment on ne nous explique le fonctionnement de la société dans les années 2120, mais la pièce est habillement écrite et continue de révéler des éléments tout le long de la représentation pour que le spectateur reste captivé. Les comédiens passent habilement à l'incarnation des personnages de 2021 à ceux de l'époque du film de science-fiction, et la scène qui représente la production de ce film dans les années 2020 est particulièrement drôle, contraste avec les scènes précédentes et mets le jeu des comédiens en valeur. Une pièce vraiment bien huilée qui divertit tout en nous faisant réfléchir à travers la représentation d'un futur meilleur.

Même rédacteur·ice :

Science-fictions

De Selma Alaoui

Mise en scène : Selma Alaoui
Avec : Selma Alaoui, Olivier Bonnaud, Jessica Fanhan, Achille Ridolfi, Eline Schumacher, …
Création lumière : Giacomo Gorini
Création musique, son : Loup Mormont
Création costume : Emilie Jonet
Réalisation vidéo : Bruno Tracq
Scénographie : Marie Szersnovicz
Régie générale : David Alonso
Conseil artistique : Emilie Maquest, Coline Struyf
Conception : Selma Alaoui, Bruno Tracq
Stagiaires : Emma Gineste (deuxième assistante), Raquel Van Oost (costumes), Elena Blondiau
Assistanat à la mise en scène : Bogdan Kikena

Du 6 au 22 octobre au Théâtre Varia