À la galerie Rature,
Du 19 mai au 17 juin 2017, la galerie Rature du KulturA. présente les détournements de Gil Blondel, aka Un Faux Graphiste.
En 2015, ce jeune étudiant en écriture et analyse cinématographiques crée sa page Facebook pour y partager ses montages, ses fausses affiches publicitaires, ses fausses couvertures de magazines, mais aussi et surtout ses détournements de planches du reporter belge le plus connu à l’international, Tintin. Grâce à tout cela, celui qui s’est choisi le pseudonyme d’« Un Faux Graphiste » réunit aujourd’hui sur le réseau social près de 37.000 aficionados âgés de 7 à 77 ans.
Mais c’était sans compter sur les humanistes bourrés d’humour de la société Moulinsart qui ont trouvé que se moquer de Tintin, si ça ne rapporte rien, est illégal et doit cesser sur-le-champ. Gil a donc trouvé de nouveaux sujets pour exprimer son talent. Depuis plus d’un an, il fouille les archives à la recherche d’images libres de droit (œuvres d’Art, planches de comics…) qu’il remanie pour notre plus grand bonheur. C’est d’ailleurs de ces recherches qu’est né « Captain Nazi et la compet’ de danse » qui ornera les cimaises de la galerie Rature.
Même si de son propre aveu, ses connaissances techniques ne sont pas surdéveloppées, ses détournements des grands standards de la culture populaire sont d’une efficacité redoutable. Derrière une fausse économie de moyen, son humour grinçant lui permet de réaliser une analyse intelligente du monde, de l’actualité, des relations humaines et des réseaux sociaux…
Cet humour fin et racé, il l’a développé en s’inspirant des meilleurs humoristes belges et français qui ont bercé son enfance (Les Nuls, Kad et Olivier, les Inconnus, les Robins des Bois, les Snuls, François Damiens) et il l’a affûté plus récemment avec les humoristes américains (Louis CK, Zach Galifinakis, Bob Odenkirk et David Cross, Will Ferrell, Tim et Eric).
Située en Outremeuse, au numéro 13 de la rue Roture (petite rue aussi étroite que pittoresque), la galerie Rature et ses dirigeants ont pour objectif de monter des expositions qui leur plaisent avant tout. Il n’est pas question pour eux de faire dans le clinquant, mais plutôt de montrer au public le travail d’artistes, jeunes et moins jeunes, connus et moins connus.
Un Faux Graphiste a accepté de répondre à quelques questions (plus ou moins pertinentes)…
Première question pour que nous puissions faire connaissance… Qui est l’homme derrière ce pseudonyme accrocheur ?
UFG : Ton introduction me définit assez bien. Je suis juste quelqu’un qui a toujours bien aimé rigoler mais qui a toujours été trop fainéant pour apprendre à dessiner. Chaque jour je remercie ce merveilleux outil qu’est Photoshop, qui me permet d’écrire des petits trucs rigolos avec des supports visuels infinis ! Je ne sais pas si je vais détourner toute ma vie, mais pour l’instant c’est mon mode d’expression le plus naturel.
Qu’est-ce qui t’as poussé à créer ta page Facebook, excepté ce besoin maladif de célébrité qui caractérise la jeunesse actuelle ?
UFG : Comme tu l’as souligné (avec un mépris digne des plus célèbres chroniqueurs culturels), mes capacités Photoshop ne sont pas bien développées. J’ai donc commencé par créer des jeux de mots visuels (Kaaris Potter, Staline Renaud, Kadhafifi Brindacier, Mussolenny Kravitz) qui sont facilement réalisables : prenez la tête d’un dictateur, faites-la glisser sur le corps d’une célébrité et le tour est joué. À l’époque, j’en envoyais certains à la page « Le Grand Néant », qui s’était fait une spécialité dans ce genre de jeux de mots médiocres. Et un soir d’été, je me suis dit que j’allais tenter ma chance. J’ai donc créé un faux profil Facebook que j’ai nommé « Un Faux Graphiste » et j’ai rajouté des centaines d’inconnus, en piochant dans les fans du Grand Néant. Cette technique de communication, qui ferait rougir de honte Jacques Séguéla, m’a valu les insultes de certains, les compliments des autres. Puis j’ai créé ma page, mais jamais j’aurais pu imaginer que j’allais en faire une « sorte de métier » (notez les guillemets prudents). Mais Tintin m’a bien aidé aussi, ne crachons pas dans la soupe…
Qu’est-ce que ça fait de savoir que tout ce qu’on produit est potentiellement lu par 37.000 personnes ? Pas trop la pression ?
UFG : Je carbure au Lexomil MDR. Plus sérieusement, je crois que tous les gens qui gèrent une page stressent un peu quand quelque chose ne marche pas. Mais ce qui marche n’est pas toujours le meilleur, loin de là, il faut donc faire un peu abstraction et ne pas devenir ce que les jeunes d’aujourd’hui nomment si affectueusement une « pute à clics » (notez les guillemets prudents).
Je crois savoir que ça n’est pas ta première exposition. Qu’est-ce qui t’as poussé à sortir du monde magique de Facebook pour exposer tes détournements dans des lieux concrets et rencontrer le public ?
UFG : Le plaisir de voir quelqu’un rigoler en vrai. Alfred de Musset n’a-t-il pas dit « Le sourire d’un enfant vaut tous les likes de la terre entière » ? Ce n’est vraiment pas pour donner plus de valeur artistique à mes détournements qu’ils n’ont. En plus parfois on me donne des chips et de la bière gratuite, une vie de roi.
Alors comme ça tu prépares un album ! Est-ce que tu peux nous en dire plus ?
UFG : Je compte coiffer Philippe Geluck et Stan Lee au poteau ! Je l’ai presque fini, et on y trouvera plein d’inédits dont je suis particulièrement fier ! Comme sur Facebook, je privilégie les trucs rapidement lisibles (la génération 2.0 ma bonne dame que voulez-vous), je me suis lâché dans les détournements BD d’une ou plusieurs pages.
Des pages Facebook, sites, Tumblr à nous conseiller ?
UFG : Bizarrement (ou pas), je lis assez peu de trucs sur internet. Récemment, j’ai juste vu les jolies caricatures prototypiques de Salch. Par contre, je suis en train de relire tous mes vieux Spirou et je tombe sur des bédés absolument géniales : « Puddingham Palace », « Les Dragz », « Les Zorilles », « Pedro le Coati ». C’est vraiment à mourir de rire et super créatif. J’espère que je suis pas hors sujet.
Tu as trente secondes pour nous donner envie de voir cette expo !
UFG : C’est gratuit, c’est un concentré de mes meilleurs et de quelques inédits, les impressions sont belles et les voir sur papier, c’est chouette : ça met bien en valeur tous ces dessins et bédés que j’ai honteusement volé. L’endroit est super joli et il y a un resto vegan juste à côté… Ah merde je me suis planté sur la fin !
Abusons un brin… Tu aurais un détournement en exclu, rien que pour nous (même un pas fini, ça serait ton Alph’Art) ?