À Liège, les Parlantes
Le 4 mars prochain s’ouvrira la troisième édition des Parlantes, le festival international de lecture de Liège. Avec des invités renommés comme Marc Zinga, Alexandra Lamy ou encore Caroline Lamarche, Les Parlantes s’imposent comme une manifestation éclectique et accessible. Pour l’occasion, Karoo a rencontré sa directrice, Vanessa Herzet.
Nous sommes à quelques heures du lancement de cette troisième édition qui se démarque par sa philosophie singulière : proposer au public des lectures de textes principalement issus de la littérature écrite plutôt qu’orale. Pourquoi ce choix ?
L’idée initiale était de créer un événement autour de la littérature à haute voix. La philosophie conductrice du festival est de faire sortir la lecture du confidentiel, de créer une dynamique autour de la littérature oralisée, autour des textes que le public n’a pas l’habitude d’entendre. Il faut à la fois surprendre par le choix du lecteur et par le choix du texte lu. C’est par exemple Francis Huster qui lit
Bronx
ou Marc Zinga qui déclame des passages de
Congo, une histoire
. Ce qui importe pour nous, c’est de créer un événement autour des mots pour le « grand public », un public qui ne soit pas forcément connaisseur. Le festival Les Parlantes doit rester un moment fédérateur.
D’où est née l’idée de ce festival ?
C’est une idée qui a fait son chemin… Pendant près de dix ans, j’ai été enseignante. Romaniste de formation, j’ai donné des cours de français et d’histoire tout en développant, parallèlement, des ateliers d’écriture. De fil en aiguille, différents projets autour de la lecture et de l’écriture ont vu le jour, de manière discrète. En 2011, avec Simon Bouazza et Daniel Van Kerkhoven du Forum de Liège, nous avons commencé à réfléchir à une manifestation autour de la lecture, avec la volonté de faire dire des textes par des comédiens, comme Fabrice Luchini.
Dans la foulée, le festival qui se déroule sur quatre jours s’est vu prolongé par des petits rendez-vous hebdomadaires, pendant tout le reste de l’année, sous le label Les Parlantes etc. Comment s’est mis en place ce festival « off » ?
La première édition, en mars 2013, a connu un gros succès. On avait envie de cultiver cette dynamique de manière ponctuelle, en variant les activités et en testant d’autres formules. C’est aussi une manière de fidéliser le public qui était très demandeur et de prolonger des partenariats avec d’autres associations liégeoises. On a un bel exemple de collaboration avec les « Rimes& Blues » : cette activité met en scène un performeur, qu’il soit poète et/ou comédien, déclamant des textes sur une improvisation musicale d’un orchestre de blues. Elle réunit notamment trois opérateurs : le Blues Sphère, l’asbl Levée de paroles et les Parlantes évidemment. À côté de cela, on propose également des animations autour de la chanson française avec Les Acoustiques, mais aussi des balades littéraires ou des « dégustations lectures ». Bref, Les Parlantes etc. se veut un rendez-vous récurrent entre avril et février autour de la lecture.
Le programme que tu proposes depuis trois ans est très attrayant : on y a vu Jean-Louis Trintignant, Francis Huster, Alexandra Lamy, Nicolas Ancion et bien d’autres. Comment convaincre des personnalités de lire des textes littéraires ?
Cela se passe très naturellement. Le projet est principalement porté par le Forum, un endroit que les comédiens connaissent bien. Les artistes sont séduits par le concept et sont contents de sortir de leurs habitudes.
En quoi Les Parlantes est-il différent des autres festivals autour du livre ?
C’est avant tout une initiative privée, on est dans une logique événementielle. L’idée principale est de regrouper différents milieux artistiques, le théâtre, la scène, la musique et évidemment la littérature. La relation avec le texte est différente : avec Les Parlantes, on retourne un peu vers les traditionnelles veillées, les lectures classiques d’antan. Le texte n’a plus de dimension commerciale ; on redécouvre, me semble-t-il, l’acte gratuit de la lecture. Aujourd’hui, le milieu culturel et littéraire est obnubilé par la question du support, notamment avec la question du numérique. Avec Les Parlantes, on revient aux mots, au texte, on lui donne une chair, une consistance qui permettent un peu de dépasser la question du support.
La lecture – et Nancy Huston l’explique très bien dans son essai l’Espèce fabulatrice – est un des besoins fondamentaux de l’être humain. On a besoin, pour vivre et grandir, d’imaginer des histoires. Les Parlantes renoue avec cette vieille tradition.