Aline
Le groupe français Aline passe le cap maudit du second album en nous livrant un opus tanguant entre l’hédonisme et la mélancolie. Dansant, surprenant et contagieux, la Vie électrique prolonge l’été par ses mélodies efficaces.
Fondé en 2009, le groupe marseillais Aline avait livré en 2013 un premier album, Regarde le ciel , comprenant le tube insouciant Je bois et puis je danse . Repéré et chouchouté par les Inrockuptibles après avoir gagné leur concours CQFD (Ce qu’il faut découvrir), il se définit par une pop énergique aux couleurs de la pop indie britannique des années 1990. Aline fait partie de cette nouvelle vague française dans la lignée de La Femme, Lescop et Mustang. Leurs influences anglophones ont poussé les membres du groupe à envoyer, sans y croire réellement, la maquette de leur second album à Stephen Street, producteur des Cranberries, de Blur mais aussi et surtout des Smiths, une de leurs inspirations principales. Mais, à la surprise générale, Stephen Street, qui n’avait jamais travaillé avec un groupe français, accepta l’offre. Encadré par cette référence d’outre-Manche, le groupe a donc cultivé la tradition anglaise de privilégier une pulsion éclatante au détriment des textes. Privilégier la danse au détriment des mots.
Le titre de l’album vient du roman éponyme d’Albert Robida, romancier français d’anticipation du XIX e siècle. Surprenante référence pour un album qui se veut aussi plein de surprises. L’hédonisme de Regarde le ciel se retrouve notamment dans le single principal portant le titre de l’album, la Vie électrique . Guitares à la Smiths, claviers aérés, mélodie mnémotechnique, thème passionnel : cette chanson a tous les ingrédients du tube estival. Cependant, le clip se montre kitsch et relativement peu intéressant. Il met en scène la rencontre dans un bar entre un homme (Romain Guerret, le chanteur d’Aline) et une jeune Afro qui se révèle être une vampire. On espère que le groupe laissera de côté ses lubies lugosiennes pour revenir à des clips de qualité (par exemple Elle m’oubliera ).
Mais l’hédonisme laisse place également à la mélancolie: Avenue des armées , qui évoque la réminiscence amoureuse, la guerre de 14-18, la nostalgie, de même que Plus noir encore , morceau presque instrumental sur un fond de dub. Mais le coup de théâtre de l’album reste Promis, juré, craché . Une parodie punk, un hymne anti-pop à prendre au second degré, dont les paroles sont : « C’est fini, terminé, plus de pop, j’en ai plein les bottes. Je n’en peux plus, j’en ai marre, je déteste le son des guitares. » Romain Guerret nous rassure à propos de cette chanson pleine d’autodérision en affirmant : « C’est ce que j’aime faire : gueuler dans un micro en grattant trois accords. Et je continuerai. » De quoi soulever quelques questions sur l’état de la French pop, son mépris par certains et sa glorification par d’autres. Après sa réussite en studio aux côtés de Stephen Street, Aline va maintenant devoir défendre son dynamisme sur scène. Une tournée en France, en Belgique et en Suisse est en préparation.