Festival mondial
Tous les deux ans, à deux pas de chez nous, en Ardennes françaises, la vie théâtrale de Charleville-Mézières ne tient qu’à un fil : celui des marionnettes.
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Septembre 2015. Pour la dix-huitième fois, Charleville-Mézières devient le plus grand rassemblement de marionnettes du monde. Une ville castelet. Même si l’image du petit théâtre pourrait paraître désuète à certains. Outre les trois cents représentations et quelques du Festival mondial des théâtres de marionnettes, à la manière d’Avignon, un festival off existe. Si l’offre du off rivalise en qualité et quantité avec son grand frère, c’est aussi le budget qui intéresse les nombreux amateurs du genre puisque les représentations off-icielles sont entièrement gratuites. Et pour désengorger les files d’attente, les programmateurs du in font une suggestion supplémentaire à travers une formule dite festival off de rue. Si vous n’y comprenez rien, laissez-vous simplement guider par vos envies, sans craindre les aléas météorologiques car les jours de pluie, les représentations investissent les espaces couverts, librairies ou halls d’entrée. D’ailleurs, la ville existe à travers les marionnettes tant dans les vitrines des magasins que dans les menus proposés aux restaurants. Ce sont aussi des spectacles de rue visibles en continu et en alternance sur la place Ducale, ainsi que dans plusieurs cours, coins et recoins de la ville natale de Rimbaud. L’homme aux semelles de vent souffle encore une certaine énergie poétique, que ce soit à l’école mondialement réputée, l’Institut international de la marionnette, ou au Conservatoire, dans les bibliothèques et autres centres culturels.
Ajoutons à ce rassemblement monstre de spectacles de marionnettes, toutes catégories confondues, une offre incroyablement intéressante de rencontres, d’échanges, d’expositions, d’ateliers, de conférences, de causeries en tout genre. La présence de nombreux spécialistes, journalistes ou philosophes, de libraires, de musées et d’auteurs ainsi que de représentants de l’art reconnus par leurs pairs.
Le festival off se veut être un tremplin et une première reconnaissance pour les compagnies participantes, c’est une des raisons pour laquelle les représentations sont gratuites et de qualité. L’autre étant l’envie de perpétuer un caractère social à la ville qui accueille un festival in très réputé. Si, comme d’autres capitales européennes, la ville est coupée en deux entités, cette séparation profite à tous et Charleville mérite amplement son titre de capitale mondiale de la marionnette. Aussi aurons-nous l’occasion de vous présenter nos coups de cœur, issus sans distinction du in et du off de l’édition 2015 ; en salle et dans les rues.
La vie est belge
Le théâtre de chez nous n’a pas à rougir de ce qu’il crée. Parfois qualifiés de surréaliste mais toujours perçu positivement, notre production de spectacles de théâtre, de danse ou de cirque ne laisse plus personne indifférent. Les petits Belges ne sont petits que dans leur pays, car passé les frontières c’est avec les honneurs qu’ils sont convoités. Comme une petite bombe dont on perçoit toujours les hommages collatéraux. Dans le domaine de la marionnette, ils occupent une place majeure. Le musée des Arts de la marionnette de Tournai et le Centre de la marionnette de la Fédération Wallonie-Bruxelles ne tiennent pas un simple rôle de figuration. Création, diffusion, formation, transmission, réflexions et résidence ne sont pas que des mots. Agnès Limbos, de la compagnie Gare centrale, est réputée pour son théâtre d’objets. Elle était l’invitée d’une rencontre consacrée à ce type particulier de manipulation, en plus des deux spectacles auxquels elle a participé (
Ressacs
, dans lequel elle joue aux côtés de Gregory Houben, et
les Misérables
).
Durant cette saison, Karoo a le projet de vous proposer une série d’articles consacrés à cet art ancestral en pleine mutation. Nous avons déjà proposé un article dédié à la 3D . Le scénographe Armand Richelet-Kleinberg étant d’ailleurs présent à Charleville avec le Fabuleux Voyage de monsieur Nostoc , d’après l’auteur jeunesse Patrice Seiler.
En hôte très spécial, affichant complet pour toutes les représentations, la compagnie des Chemins de terre n’a aucun complexe à se faire aux côtés de Duda Paiva, ou des Anges au plafond, compagnie et artiste invités cette année. Lors de la précédente édition (2013), Stéphane Georis, en Olaf, le polichineur de tiroirs et Richard, le polichineur d’écritoire , était d’ailleurs lui-même invité d’honneur. Nous souhaitons longue vie à la nouvelle création, l’Enfant cosmonaute , mise en scène par Louis Spagna, dont nous ne manquerons pas de vous relater les pérégrinations.
Nous ignorons si c’est parce que la Belgique n’est pas grande ou si c’est la loi de l’offre et de la demande déréglant le marché qui a poussé le Cyclo Théâtre à nous proposer un spectacle de six minutes pour maximum six spectateurs. Drôle, simple, efficace, sans longue file d’attente, c’est sur un vélo de glacier que le show a lieu !
Passons rapidement sur la compagnie des Six Faux Nez et son chapiteau-entresort, ainsi que sur Les Liseuses, dont nous n’avons malheureusement pas eu l’occasion de voir la Bassine, sons d’histoires , pour rappeler la richesse de notre potentiel, à l’image de Borgia, comédie contemporaine , par la compagnie Point zéro, mis en scène par Jean-Michel d’Hoop, sur un texte de Thomas Gunzig, avec notamment Anne Romain et Isabelle Wery, en tournée cette saison après des débuts prometteurs au Théâtre royal du Parc et au Jean Vilar, la saison dernière. Une histoire de famille, où des portes s’ouvrent sur zones interdites à explorer. Une famille absolument normale malgré tous ses dysfonctionnements…
N’oubliez pas de réserver votre dernière semaine de septembre 2017, ou au moins l’un des deux week-ends, pour déambuler dans cette ville chaleureuse et manipulée à souhait pour des créatures improbables : un cadeau pour les yeux, les oreilles et le corps. Escapade à effectuer avec ou sans enfants, vous l’aurez compris.