critique &
création culturelle

La rétrospective culturelle 2025 de Pierre

2025 en cinq secousses culturelles

Prendre le temps de regarder en arrière permet parfois de mieux comprendre ce qui nous a traversés. En 2025, les œuvres qui ont marqué l’année n’ont pas forcément été les plus bruyantes, mais celles qui ont su capter une émotion diffuse : la fatigue du monde, le besoin de communauté, la quête de sens face à l’effritement des certitudes. Entre musique, cinéma, théâtre et série, ces cinq coups de cœur dessinent un paysage culturel traversé par la mélancolie, la lucidité et, parfois, une forme de consolation.

Futique – Biffy Clyro (album sorti le 19 septembre 2025)

Avec Futique, Biffy Clyro livre un album à la fois dense et vulnérable, où l’énergie brute du rock se heurte à une introspection presque douloureuse. Les morceaux oscillent entre urgence et retenue, comme si le groupe cherchait à capturer l’instant avant qu’il ne se dérobe. L’album impressionne par sa cohérence émotionnelle et sa capacité à parler du futur sans naïveté, en assumant les fêlures du présent. Un disque qui s’écoute comme un corps-à-corps avec le temps, et qui s’impose par sa sincérité plus que par l’esbroufe.

Lana Del Rey à Anfield – Liverpool (concert le 28 juin 2025)

Voir Lana Del Rey se produire dans un stade comme Anfield relevait presque du paradoxe. Et pourtant, le concert a su préserver une forme d’intimité rare à cette échelle. Portée par une scénographie épurée et une setlist habitée, l’artiste a transformé un lieu mythique du football en espace de confession collective. La mélancolie, la nostalgie et la fragilité — piliers de son univers — ont résonné avec une intensité particulière. Plus qu’un concert, une expérience suspendue, où le silence comptait autant que les applaudissements.

Les Justes – Théâtre Jean Vilar, Louvain-la-Neuve (le 2 octobre 2025)

Cette mise en scène des Justes frappe par sa sobriété et sa rigueur morale. En redonnant toute sa force au texte de Camus, la représentation interroge frontalement la légitimité de la violence, le poids des convictions et le vertige de l’engagement. Le jeu des comédiens, tendu et précis, installe un malaise salutaire : celui de questions sans réponses simples. Dans un monde saturé de prises de position immédiates, cette proposition théâtrale rappelle la nécessité du doute et de la complexité.

© Matthieu Delcourt

Train Dreams – Clint Bentley (film de l’année)

Film de l’effacement et de la persistance, Train Dreams est une œuvre d’une délicatesse rare. Clint Bentley y capte la solitude d’un homme face à un monde en mutation, avec une mise en scène d’une grande pudeur. Le film avance à bas bruit, laissant les paysages, les silences et les gestes raconter ce que les mots taisent. En refusant le spectaculaire, Train Dreams s’impose comme une méditation profondément humaine sur le passage du temps, la mémoire et la disparition. Une expérience contemplative qui marque durablement.

Task, saison 1, épisode 6 – réalisé par Salli Richardson-Whitfield (épisode de l’année)

Cet épisode constitue un point de bascule magistral dans la série Task. Par une réalisation d’une grande maîtrise, Salli Richardson-Whitfield parvient à faire converger tension dramatique, profondeur psychologique et commentaire social. Le rythme, les choix de cadrage et la direction d’acteurs donnent à l’épisode une densité émotionnelle remarquable. Plus qu’un simple sommet narratif, cet épisode démontre ce que la série télévisée peut offrir de plus ambitieux : un espace de réflexion, de mise en crise et de mise en forme du réel.

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