@FIFF2016
Quand les non-dits explosent, les blessures s’ouvrent et les passions naissent. Ce sont des moments très forts que nous offre le jeune réalisateur Morgan Simon dans son premier long métrage.
Vincent (Kévin Azaïs) a vingt-quatre ans. Il est seul, perdu, et fait face à un père (Nathan Willcocks) distant et blessant. Pour s’exprimer, il hurle sa frustration dans son groupe de hard rock et tatoue son corps. Cela lui permet de maintenir cette relation en équilibre instable avec son père. Mais tout explose avec l’arrivée de Julia (Monia Chokri), nouvelle compagne du père.
Le film commence avec une force tellement surprenante qu’elle peut désarçonner. Les plans s’enchaînent rapidement et sauvagement, donnant une impression de chaos qui exprime, comme on le comprendra très vite, les sentiments de Vincent. Il faut peut-être un peu de temps pour s’habituer et entrer dans le film, mais sa force n’en est que plus grande. ll faut avoir à l’esprit que l’histoire nous est racontée du point de vue de Vincent. On voit ce qu’il ressent, ses peurs, son dégoût. Nous ne sommes pas de simples spectateurs, assistant impuissants au récit qui se trace devant nous. Nous sommes directement impliqués et obligés de ressentir ce qu’il subit.
Si le film parvient à nous faire adopter directement le point de vue de Vincent, c’est surtout grâce à la performance de Kévin Azaïs, qui mérite d’être soulignée. Il arrive, sans même prononcer le moindre mot, à faire passer des émotions très fortes. C’est surtout le cas lorsqu’il est filmé de face et en gros plan. Il n’y a besoin d’aucun mot pour comprendre le message qu’il veut faire passer. C’est comme s’il racontait une histoire avec son visage. Kévin Azaïs réussit également à faire alterner ces scènes « fixes » et réflexives avec des scènes hyperactives et chaotiques et il en maîtrise les deux extrêmes.
Un autre aspect important est sans nul doute le scénario ; un point qui peut en rebuter plus d’un. Les éléments qu’on retrouve du début à la fin sont banals : les tensions entre un père et un fils en l’absence de la mère. Et puis d’un coup, tout bascule. La fin du film surprend. Elle est brutale et originale, comme l’a été le début du film, en net contraste avec sa partie médiane. Était-ce une bonne idée de conclure avec autant de force ? Oui, sans doute. Cette méthode a l’avantage de faire réfléchir les spectateurs, de les amener à réfléchir un peu plus loin.
Compte tes blessures est un film qui surprend. Que ce soit au niveau de la performance des acteurs ou de l’histoire, difficile de rester de glace ou de ne rien ressentir. On peut aimer ou ne pas aimer, mais ce film aura au moins réussi à nous toucher, d’une manière ou d’une autre.