@FIFF2017
Mardi 2 octobre, Hubert Charuel présentait son premier long-métrage au FIFF, à Namur. Fils de producteurs laitiers et fraîchement diplômé de La Fémis, il a choisi de raconter l’histoire d’un jeune agriculteur confronté à une épidémie et qui ne se résout pas à perdre ses vaches.
Dès la première scène, le cadre est planté : un petit paysan nommé Pierre (interprété par Swann Arlaud) se réveille dans une chambre envahie par des vaches. Bien plus qu’un rêve, cette première introduction au personnage met en avant son obsession pour son élevage. À trente ans, il vit toujours chez ses parents et ne sort presque pas. Le petit paysan est un trentenaire ordinaire et un peu excentrique…
Effrayé par les rumeurs d’épidémie, il se rend compte qu’une de ses vaches présente les symptômes d’un virus qui risque de décimer tout son troupeau. Il cache alors la vérité à sa sœur vétérinaire. L’enjeu est tel que Pierre ne risque pas seulement de perdre son travail, il risque aussi de perdre sa passion.
La caméra capte tout les instants que Pierre passe à s’occuper des ses vaches, si bien qu’il est parfois difficile de se rappeler l’aspect fictionnel de l’œuvre. Certaines scènes, comme par exemple l’agonie d’un veau, semblent tout droit sorties d’un documentaire, tant elles paraissent vraies. Pourtant, comme Swann Arlaud le rappelle, il ne s’agit que de cinéma. L’acteur est totalement effacé et se met au service du film en optant pour un jeu très minimaliste. Pour interpréter ce rôle, il a dû faire des concessions que peu d’autres acteurs auraient acceptées. Aucune doublure n’est utilisée et c’est bel et bien Swann qui accomplit l’accouchement d’un veau et d’autres actions auprès des vaches. Swann Arlaud et Anna Giraudau (qui joue le rôle d’une vétérinaire) ont tous les deux dû suivre une formation auprès de fermiers afin d’incarner au mieux leurs personnages. Ce souci du détail efface toute comédie et transforme radicalement les acteurs. Pour accentuer cette crédibilité, le réalisateur a fait jouer son grand-père ainsi que ses parents, tous issus du milieu agricole. Ainsi, les acteurs professionnels se confondent avec les amateurs pour ne former qu’une seule famille.
Une autre belle trouvaille du film est d’avoir fait de Bouli Lanners un fermier Youtubeur, avide de succès. Ses petites vidéos viennent ponctuer le récit et renforcer les craintes du protagoniste par rapport à l’épidémie. Le réalisateur, qui pensait ne jamais pouvoir tourner avec le comédien belge, lui offre un de ses rôles les plus drôles et justes. Sous ses allures de thriller, Petit Paysan comporte également une bonne dose d’humour. En jouant sur cette légèreté, l’angoisse du protagoniste et la mort imminente de son troupeau restent supportables pour le spectateur.
Le milieu agricole n’est pas seulement un décor, il est aussi un moteur de la fiction. Toute l’action se concentre sur cette ferme et très peu sur l’extérieur. Le protagoniste sait d’où il vient et ne renie pas qui il est. Hubert Charuel a réalisé un film à l’image de son petit paysan : simple et authentique. En ne cherchant pas à épater ou émouvoir le public au plus haut point, il approche son sujet de la meilleure manière qui soit.