Hot Milk de Rebecca Lenkiewicz
Ambiance suffocante

Le film Hot Milk, adaptation du roman de la célèbre autrice Deborah Levy, dépeint la relation tendue entre Rose, une mère paralysée en fauteuil roulant, et Sofia, sa fille qui doit s’en occuper. La réalisatrice Rebecca Lenkiewicz présente un paysage d’été sur la côte espagnole où se trouve un médecin singulier qui essaye de s’occuper des douleurs et de trouver un remède à la maladie mystérieuse de la mère jouée par l’actrice irlandaise Fiona Shaw.
Hot Milk est un long-métrage de 92 minutes qui retrace le séjour de Sofia et de sa mère Rose à Almeria, une station balnéaire dans le sud de l’Espagne. Pendant ce séjour, elles rencontrent le docteur Gomez au sein d’une clinique de luxe dans l’intention de guérir la paralysie de Rose qui ne peut plus marcher pour une raison que nous ignorons. Sofia met entre parenthèse sa vie et sa thèse pour cette méthode médicale singulière. Sous la chaleur tropicale, elle fait aussi la connaissance d’Ingrid, une jeune Allemande pleine de charme et de sensualité.
La réalisatrice nous invite à observer des paysages bruts de la mer avec des cadrages ouverts et serrés sur Sofia, jouée par l’actrice de Sex Education, Emma Mackey. Le paysage s’inscrit dans un rythme assez lent et contemplatif, comme une immersion dans l’atmosphère écrasante des périodes caniculaires. Ces choix de la réalisatrice accordent une importance à ce qui se passe visuellement, à ce que nous observons au niveau des expressions du visage souvent tendues ou des paysages de la côte espagnole, plutôt qu’aux dialogues qui sont assez minimalistes, avec de multiples moments de silence.
Cette œuvre, qui s’annonce d’abord psychologique et existentielle, glisse progressivement vers un autre registre pour se transformer en un thriller haletant, surprenant, chargé de tension et de suspense. Les relations interpersonnelles de Sofia se tendent et s'assombrissent en crescendo, alors que son regard devient suspicieux sur la véracité du handicap de sa mère. La liberté sexuelle d'Ingrid, avec qui elle entretient une relation, lui déplaît jusqu’à la mettre dans une véritable colère. Des questions se posent : Rose est-elle réellement malade physiquement ou est-ce seulement psychologique ? Qu’est-il arrivé dans son passé pour qu’elle soit paralysée ? Pourra-t-elle se relever ? Quel est le passé d’Ingrid ? Des questions-réponses qui nous laissent la libre interprétation sur l’histoire, mais qui peuvent aussi frustrer par le manque d’explications.
Ainsi nous suivons l’agitation intérieure de la jeune femme grâce aux expressions de son visage, plus sévères, et à travers ses actions qui deviennent parfois insensées. Le jeu de l’actrice Emma Mackey est observable par les émotions qu’elle exprime à travers ses gestes corporels et son regard sinistre. Son personnage est de plus en plus tendu par les ordres capricieux de sa mère, par sa relation tumultueuse avec une jeune femme très libérée, par son père qui l’a abandonnée et qui est distant avec elle. Une tension perçue lorsque Sofia menace agressivement un homme avec un couteau. Sofia, qui restait calme au début du film face à une mère contrôlante, se transforme en quelqu’un de presque dangereux, et on se demande où est sa limite. Le sentiment d’angoisse grandit donc peu à peu, porté par la chaleur écrasante de l’été, jusqu’à craindre que Sofia, au bord de la crise de nerf, commette l’irréparable.

Si vous aimez les atmosphères oppressantes avec du suspense, ce film est pour vous. Avec ce rythme lent et ces paysages vertigineux de l’océan, Rebecca Lenkiewicz nous plonge dans les expériences anxiogènes que Sofia traverse à travers les figures de sa mère et d'Ingrid. Hot Milk questionne les limites humaines face à un monde qui nous pousse dans nos retranchements.