La matière dont sont
Ascanio Celestini prend les planches en personne pour sa dernière création en Belgique, Dépaysement, pépite d’un théâtre social aussi modeste que truculent.
Domenica vit des invendus du supermarché : elle se nourrit de jambon – périmé – de caviar, parfois – périmé aussi – de pâté – périmé. Chez elle, c’est tous les jours dimanche, mais périmé. (C’est drôle en italien parce que Domenica veut dire dimanche.) Domenica rencontre Saïd ; Saïd travaille à l’entrepôt du supermarché, il porte des cartons. Il va acheter un vélo à Domenica : il peut gagner les sous, il joue à la machine à sous ; d’après les statistiques, à un moment il va gagner. Mais Saïd n’est pas bon en maths – c’est ce que dit la dame des machines à sous, qui est belle et méchante. D’ailleurs, Saïd perd toujours – elle l’avait dit, la dame. Telles sont les histoires cruelles racontées dans Dépaysement : des vies de petites gens, faites de soupe lyophilisée, de rapine et de promesses non tenues, racontées comme des épopées princières.