L’Atelier des Lumières
À la fin du 19 e siècle, les frères Lumière organisent pour la première fois des projections mettant en scène des instants de la vie quotidienne. Si celles-ci reproduisent le réel de manière artistique, l’Atelier des Lumières donne vie à l’art dans le réel.
Atelier des Lumières… Le nom interpelle lorsqu’on pousse ces portes pour la première fois. Je me retrouve plongée dans le noir. Perte de repères. Une énorme pièce vide et froide, pas un bruit, et comme le sentiment d’être unique.
Puis, la musique retentit. Images, couleurs, coups de pinceau submergent l’œil de tous les côtés. Les peintures de Klimt et Hundertwasser sont à l’honneur dans deux séries de projections qui se succèdent. Sur toutes les surfaces de l’ancienne fonderie sont projetées en même temps les mêmes images dans un ordre différent. Musique et peintures se lient dans un rythme époustouflant.
L’impression qu’on nous raconte une histoire, sans trame ni parole. L’impression que sur chaque façade de la pièce voit le jour une nouvelle histoire. L’impression que chaque histoire est celle d’une personne et qu’elles sont toutes projetées en simultané. Le plaisir et la liberté de pouvoir regarder autant de fois qu’on veut ces créations. Serait-ce ça, l’art ? Nous faire ressentir des choses que la vie de tous les jours ne nous offre pas ?
De l’art dans l’art ? C’est une véritable mise en abyme à laquelle le spectateur est convié. À partir du travail d’autres musiciens et peintres, l’artiste crée une œuvre d’art à part entière, mêlant musique et projections d’images. Nous sommes happés, et tous nos sens sont réquisitionnés. Il ne s’agit plus d’une simple projection de lumières sur la façade d’un monument, comme certaines villes l’offrent à voir en été. Le public est ici acteur de la scénographie de l’espace, créateur d’énergie. Toutes les générations se côtoient et le mouvement de la foule apporte du dynamisme à cette expérience. La technique tend même à intégrer le spectateur dans l’œuvre lorsque, en passant devant un projecteur, une image se reflète sur son corps. L’Atelier des Lumières s’attacherait-t-il à développer une forme d’art total ?
Un regret ? Oui ! Le fait de mettre en avant le travail d’un artiste donne envie d’en savoir plus. Aucune information sur la vie, l’œuvre ou encore les techniques utilisées par ces deux figures de proue de la scène artistique viennoise.
J’aurais aimé savoir que les portraits de femmes érotisées ou encore les allégories avant-gardistes de Klimt avaient souvent provoqué l’incompréhension de son public. Que bien souvent la matière première de ses toiles était l’or, goût très probablement inspiré par son père qui exerçait le métier d’orfèvre ciseleur.
Savoir qu’Hundertwasser conjuguait art, écologie et architecture, qu’il s’attachait au refus de la ligne droite m’aurait permis d’appréhender différemment son travail.
Mais le manque d’information attise la curiosité et prouve le succès de cette exposition qui développe l’art dans son temps.
Article rédigé par Lise Clavier.