critique &
création culturelle

Adventure Time

Séries animées # 2

Cet été, Aylin Manço nous guide dans la jungle des séries animées. Objectif : faire le tri parmi la multitude de propositions. Pour ce deuxième épisode, elle évoque Adventure Time, une série non sans épaisseur et sans complexité.

C’est toujours un peu gênant quand j’essaye de parler des dessins animés que j’aime à des amis qui ne les regardent pas. Avec Adventure Time , c’est particulièrement compliqué :

Alors, c’est un garçon et son chien magique qui est son meilleur ami mais aussi son frère et, euh, ils sont les chevaliers servants de Princess Bubblegum qui règne sur le Candy Kingdom…

Ça sonne pire que cliché, c’est comme si j’avais trop bu avec des amis et qu’on avait essayé d’inventer le dessin animé jeunesse le plus convenu du monde. D’ailleurs, c’est probablement ce qui est arrivé à Pendleton Ward (le créateur de la série) et sa bande. Mais ils ne se sont pas arrêtés là : Adventure Time , c’est à la fois l’idéal platonicien de ce qu’un dessin animé devrait être et sa subversion la plus absolue.

Je m’explique.

Dans cette série, tous les poncifs sont utilisés et retournés comme des gants.

C’est un dessin animé pour enfant, il y a donc forcément un héros loyal et noble, Finn.

Mais il n’est pas sans épaisseur ou sans complexité. Le monde de Ooo est un monde post-apocalyptique, c’est la Terre des milliers d’années après la dernière guerre nucléaire, quand la magie a repris ses droits. Finn est le Dernier Humain. Il a été abandonné par ses parents et élevé par un couple de chiens doués de parole. Il passe toute la série à chercher ses racines et à défendre les opprimés. Mais ce n’est jamais simple : la série le met continuellement face à des problèmes sans solutions parfaites. C’est un vrai héros : il est capable de faire des choix difficiles.

C’est un dessin animé pour enfant, c’est donc forcément bourré de princesses.

La principale est Princess Bubblegum, la seigneure lige de Finn, mais il y en a plein d’autres : Slime Princess, Flame Princess, Lumpy Space Princess, Ragdoll Princess… Toutes les dirigeantes de ce monde sont des princesses. Ce monde matriarcal rend possible des renversements de genres délicieux. Lors d’un combat, Princess Bubblegum lance à son homologue Flame Princess : « Come on and fight me like a princess ! ». Princess Bubblegum, en particulier, est un personnage complexe : c’est une dirigeante rationnelle, passionnée de sciences et au sens moral parfois bancal. Sa main-mise maternaliste (oui oui, maternaliste) et complète sur ses sujets du Candy Kingdom est souvent questionnée par la série.

C’est un dessin animé pour enfant, ça raconte donc forcément des histoires cousues de fil blanc.

Oui, non, alors là pas du tout. Entrer dans Adventure Time , c’est entrer dans une fresque monumentale. On peut passer sans transition d’une pluie littérale de couteaux à un épisode hallucinant sur le pouvoir de l’imagination ( Rainy Day Daydream , saison 1) ou d’une communauté absurde de maisons anthropomorphes à une réflexion sans concessions sur le moindre mal ( Donny , saison 1). Toutes les influences du fantastique, de la SF, de la fantasy et du jeu vidéo sont ici digérées et transformées en une série qui galope dans toutes les directions à la fois et ne s’arrête jamais.

Par où commencer ?

Alors oui, il y a plein d’épisodes et ça peut paraître effrayant de prime abord. Mais n’ayez crainte, même si la série est « feuilletonnante », la plupart des épisodes peuvent être appréciés individuellement. Je vous propose donc une sélection de cinq de mes épisodes préférés, qui donnent une vision de ce qu’ Adventure Time offre de meilleur.

S01E23 : Rainy Day Dream

S02E01 : It Came from the Nightosphere

S03E03 : Memory of a Memory

S04E13 : Princess Cookie

S06E07 : Food Chain

Et si vous voulez commencer par le début, n’hésitez pas à sauter la saison 1 (un peu moins bonne) et à commencer directement à la saison 2. Si vous y prenez goût, vous pourrez toujours y revenir plus tard !

Même rédacteur·ice :

Adventure Time with Finn and Jake

Créée Pendleton Ward
Avec les voix de Jeremy Shada , John DiMaggio , Hynden Walch , Niki Yang
États-Unis , de 2010 à 2018
261 épisodes de 11 minutes

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