J’ai senti battre notre cœur
Premiers pas d’une histoire d’amour
10 septembre 2018 par Mathilde Alet dans Livres | temps de lecture: 4 minutes
J’ai senti battre notre cœur
est le court récit du commencement
d’une histoire d’amour.
Écrit en je l’amoureuse,
en tu l’homme aimé,
et au nous naissant.

Le soir du ciel sur la tête, dans ce musée, le soir du premier ciel, le soir de toi à contresens, rien ne tourne rond, et ce sera notre force, notre raison d’être. Les amis qui devaient m’accompagner oublient le rendez-vous. Je me retrouve seule face à toi. Toi, ce soir-là, tu oublies ton chapeau, sur un mange-debout. Tu perds de vue le chapeau, mais tu captes mon regard sur le chapeau déposé là. C’est ainsi que nos regards se croisent une seconde fois au cours de la soirée, la première c’était lorsque tu marchais.
Dans une interview1 à propos de son dernier film, Plaire aimer et courir vite, le réalisateur Christophe Honoré disait : « De la même manière qu’un virus se transmet, un langage amoureux se transmet, des gestes amoureux se transmettent. » Il citait l’exemple d’une personne au sein d’un couple qui devine un adultère parce que soudain l’autre fait un geste inhabituel, geste qui ne vient pas de leur couple mais de quelqu’un d’autre. Dans J’ai senti battre notre cœur, c’est le langage d’un nouveau couple qui se construit. La marche qui les tient côte à côte souligne aussi les dissonances. Si l’un marche, l’autre suit ? « Qui marche au rythme de qui ? », s’interroge Véronique Janzyk. Découvrir le langage du couple passe ici par la recherche d’un souffle commun.
À marcher ainsi, si vite, je sentais qu’une fine pellicule nous enveloppait tous les deux. Enrobés par elle, nous fendions la foule. Un jour, je nous ai perçus dans des emballages respectifs. J’ai espéré que ce serait transitoire.

Le livre de Véronique Janzyk m’a un peu fait penser au premier roman de Victoire de Changy, Une dose de douleur nécessaire, chroniqué il y a quelques mois dans Karoo. Ces deux textes, chacun dans leur langue et leur poésie propres, abordent l’histoire d’amour sous les angles infinis de l’infiniment petit : la vitesse des pas, un chapeau, un manteau, des insectes… Et tous deux m’ont fait me poser cette même question : non pas qu’est-ce que l’amour, mais qu’est-ce qu’une histoire d’amour ? Comment met-on l’amour en récit ? Le récit pourrait être une manière d’ordonner le chaos. Pour raconter une histoire d’amour, on sélectionnerait sur sa frise chronologique les principaux faits marquants, une rencontre un baiser une dispute un bébé. Mais le récit pourrait aussi, plutôt que de l’ordonner, donner à voir le chaos – et quoi de plus chaotique que l’amour ? On pressent qu’il en sera plus juste. Le texte de Véronique Janzyk sonne juste parce qu’il tente de mettre en récit l’amour en scrutant de très près les gestes qui le dansent, sans factualiser, mais sans non plus ignorer les mythes et mensonges qui le façonnent.
Dans l’émission de La Première RTBF Dans quel monde on vit, le 23 juin 2018 à réécouter ici : https://www.rtbf.be/auvio/detail_dans-quel-monde-on-vit?id=2366420. ↩
L'auteurMathilde Alet
Parmi mes vies, je suis autrice. J’écris des romans à l’heure du premier café. Pour Karoo je chronique mes coups de cœur, surtout puisés dans la littérature Made in Belgium.…Mathilde Alet a rédigé 27 articles sur Karoo.
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