On commence par une page blanche, puis une bulle apparaît, puis une autre. On ne voit  pas encore de personnage mais la conversation est engagée. En noir et blanc, le dessin prend forme : de simples points se changent en boules, qui figurent un visage, auquel s'ajoute un corps, puis des bras et des doigts. C'est un bonhomme, et il s'étonne.

En fait, c'est un homme. Il participe à une expérience de réalité virtuelle et ces images correspondent à sa vision subjective. Face à lui, une femme mène l'expérience, elle pose des questions et lui donne des explications. Un dessin au tracé plus précis, en plan large, réunit ces deux personnages et nous révèle le dispositif : l'homme porte des lunettes connectées à un ordinateur relié à une flopée de câbles.

Quand on se place à nouveau du côté du bonhomme, la machine s'emballe... c'est l'occasion d'ajouter des couleurs.

Sous une mécanique très simple, notre position de lecteur est très complexe. D'abord étranger au récit, simple curieux, plutôt perplexe, on est vite pris dans le mouvement narratif, par la lecture interactive. C'est magique ! Par le simple défilement des plans les uns après les autres, on participe au dialogue entre les mots et les images, et par immersion, on va jusqu'à s'identifier au personnage… jusqu'à la chute. Puis en l'espace d'un rire, on retombe sur nos pattes.

Ce petit objet numérique a tout d'un exercice de style, dans lequel le fond rencontre la forme. Il s'agit d'ailleurs d'un travail réalisé en 2017 au sein de l’atelier d’illustration de la HEAR (Haute école des arts du Rhin, Mulhouse-Strasbourg).

Qu'il est doux de trouver, au hasard d'un clic sur ce World Wide Web, un lieu où se laisser émouvoir par une petite voix ‒ celle de Camille Van Hoof par exemple. Par ailleurs, cette illustratrice bruxelloise a publié plusieurs albums jeunesse ; très prolifique, elle multiplie les supports et les formats, entre BD, graphisme et journal dessiné.