Mise en scène du texte de Patrick Ourednik par Virginie Thirion et avec Anne-Marie Loop, le spectacle offre bien des décalages : l’occasion de plonger au cœur des mécanismes de la « mise en théâtre ».

L’œuvre de Patrik Ourednik, concatène petits faits et grandes analyses du XX e siècle en 160 pages, pour l’édition française parue en 2005 chez Allia. Virginie Thirion a eu le coup de cœur pour ce texte « à la fois grinçant et ludique » où fantaisie et gravité cohabitent. Pour opérer des sélections dans le livre d’Ourednik, Thirion et Loop ont notamment choisi comme fil rouge le thème de la « fuite en avant » : la tendance humaine à se promettre des lendemains qui chantent alors que rien ne change. Dans une scénographie très simple, impliquant un gradin et quelques pans de tissus sur lesquels sont projetées des vidéos, Anne-Marie Loop est accompagnée sur scène d’un chien placide, témoin silencieux de ses histoires.

La représentation m’a, je dois dire, laissée assez perplexe. Durant tout le spectacle, je n’ai pu me défaire de l’impression désagréable qu’on essayait de m’imposer une lecture sans le dire. L’interprétation m’a semblé entièrement tournée vers l’illustration d’un propos, sans distance ni pas de côté. Anne-Marie Loop, à qui l’on ne peut certes pas reprocher de manquer de présence, déploie un jeu très appuyé, à la limite de la caricature : les nazis sont méchants, les révolutionnaires sont niais mais en même temps sanguinaires, etc. À part certains éléments de comique visuel dont je n’ai pas saisi le rapport avec le discours (oh, un chien avec un chapeau), le spectacle repose essentiellement sur la performance de déclamation d’Anne-Marie Loop, ce qui a renforcé mon impression d’être face à un discours visant à me convaincre de quelque chose – en l’espèce, de l’inanité et de la dangerosité de tout type de discours politique au sens partisan (je schématise, moi aussi).