Que celui qui n’a jamais fermé un livre le cœur serré à l’idée de quitter un univers dans lequel il s’était plongé avec plaisir passe son chemin. Que celui qui n’a jamais regretté de se séparer d’un personnage à propos duquel il s’est plu à découvrir la destinée pleure sur son sort.
Alive est une ode au pouvoir salvateur de la fabulation, aux éternels rêveurs et aux personnages qui les accompagnent sur un bout de chemin.
Pendant un peu plus d’une heure, les dynamiques Emmanuel Dekoninck et Gilles Masson, à la fois musiciens et comédiens (bien que nous ne soyons toujours pas certains en sortant qu’ils aient réellement terminé le Conservatoire… private joke… c’est pour vous donner une raison d’aller le voir) nous entraînent avec enthousiasme dans l’univers du western.
Sans jamais céder à l’expérimental rébarbatif, Alive oscille sans cesse entre le réel et l’imaginaire en brisant perpétuellement le quatrième mur. Emmanuel Dekoninck est parvenu à livrer une pièce de métafiction au cours de laquelle il nous livre une part importante de son intimité en nous présentant Black, son compagnon d’enfance, son « ami imaginaire ». Black est un mystérieux cow-boy, interprété par Benoît Verhaert, qui, fatigué par la conquête de l’Ouest, part à la recherche du sens de sa vie. Mais dans cette relation presque fusionnelle, le jeune homme semble parfois avoir du mal à se retrouver et décide de se débarrasser de son héros au terme d’une ultime aventure, rappelant à son spectateur les pérégrinations tortueuses d’un certain Arthur avec un personnage devenu trop imposant mais duquel il ne parviendra cependant pas à se débarrasser.
Tout en conservant ses atouts de divertissement, rires assurés et accompagnement musical live de Gilles, Alive offre une place centrale à une interrogation souvent délaissée : quelle est la place de la fiction dans la construction de l’identité ? Sans présenter de réponse unique, la pièce nous ouvre cependant de belles perspectives de réflexion.