Après minuit,
Sandra Vigliotti était la pensionnaire de la galerie de Karoo cette semaine. Après avoir découvert sa série Après minuit , nous vous invitons à échanger quelques mots avec l’artiste.
Découvrez la série Après minuit de Sandra Vigliotti dans la galerie de Karoo.
Sandra Vigliotti, en deux mots, quel est votre parcours ?
J’ai fait des humanités artistiques à Saint-Luc, puis la photo à l’IATA à Namur. Ensuite, j’ai étudié le théâtre. J’avais toujours eu envie de faire du théâtre car j’aime beaucoup cette forme d’expression qui colle bien avec mon travail photographique. Dans tous les domaines artistiques, il y a des ponts à faire. En photo, certaines compositions, certaines situations sont très théâtrales. Ce n’est pas anodin.
D’autant plus que dans
Après minuit
, vos sujets sont souvent maquillés, costumés. Est-ce un héritage de vos études d’art dramatique ?
Justement, dans cette série en particulier, c’était le déguisement qui m’intéressait. Ce sont des personnages qui se mettent en scène, qui se travestissent. Il y a le jour, et puis la nuit. Après minuit, ils se transforment en d’autres personnages. Certains m’ont même dit qu’ils se sentaient plus eux-mêmes dans ces habits nocturnes que dans ceux qu’ils portent pendant la journée. Pour certains, c’était un moyen d’expression plus fort, qui leur permettait d’aller plus loin dans leur personnalité.
Après minuit
, c’est le mythe des douze coups de minuit qu’on trouve dans
Cendrillon
. À cette occasion, l’illusion disparaît, et l’on redevient qui l’on est vraiment.
Dans certains endroits, à partir d’une certaine heure, un autre monde s’éveille. C’est ce que je voulais montrer dans cette série. Il y a aussi une référence très forte à Alice au pays des merveilles , où l’on suit le lapin blanc dans des lieux étranges, en rencontrant des personnages qui sortent du commun. J’en profite pour dire que les photos sont très peu retouchées : elles sont brutes et naturelles pour rester fidèles à ces ambiances.
Comment naissent les associations de photos qu’on retrouve
dans cette série ?
C’est une question d’ambiance, une tentative de restituer le personnage dans une atmosphère qui n’est pas forcement celle du contexte de la photo. J’ai voulu aussi susciter des réminiscences. De ces souvenirs qui apparaissent en flash, qu’on associe instantanément avec un moment. La photo
5 h 15
, par exemple, est celle d’un travesti. Il m’a donné l’impression d’un dérapage, que j’ai associé à cette photo de route nocturne très éclairée, très jaune. Le titre est une référence à une chanson de David Bowie.
Un autre exemple, c’est la photo Spirale – Profil – Bulles . Le visage au centre m’a fait penser à un entre-deux, avec d’un côté la profondeur de l’escalier et, de l’autre, la légèreté des bulles de verres. Le Passage – la Chambre , qui représente une femme sur un lit et un couloir d’hôtel, est plus cinématographique, plus fellinienne. Jeter des ponts entre les disciplines artistiques est très important pour moi. Je ne réfléchis pas vraiment à ces associations. Elles se manifestent parfois au moment où je fais la photo, parfois bien après. C’est assez aléatoire.
Cette série est-elle toujours en cours ?
Pour le moment, elle est close. J’ai le sentiment d’avoir pu dire ce que je voulais. Ce travail a duré longtemps. Je ne pourrais pas donner de dates, mais cela correspond à une période où j’étais dans ce trip-là. Cela s’est achevé avec l’exposition chez Gordon Hopkins, rue du Page, et puis dans un restaurant, le CO2, également rue du Page.