Avignon 2019
Terre de divertissement où fleurissent les spectacles de stand-up, le festival d’Avignon n’en demeure pas moins un espace d’engagement. Retour sur des spectacles s’attaquant aux conditions de vie des enfants de rue, à l’abandon du milieu rural par l’État et aux engagements citoyens pour bâtir un nouveau modèle de société.
Baptisé cette année « Le festival aux mille visages », le festival OFF d’Avignon ne cesse d’offrir une programmation vertigineuse, où tout type de théâtre, toute conception de l’art, toute catégorie de spectacle vivant se retrouvent, concentrant dans un territoire fini une vitalité culturelle infinie. Pour proposer un autre regard sur cet événement et démasquer quelques uns de ses visages, il existe notamment un jury citoyen composé de passionnés de théâtre : le jury Tournesol.
Présidé par Jean-Luc Fauche, lui-même épaulé par Virginie Carletti, cette association se développe depuis plusieurs années comme la fleur éponyme, se donnant pour mission de récompenser et de mettre en lumière des spectacles caractérisés par l’engagement écologique, social, politique et, surtout, humaniste. Coup de projecteur sur trois lauréats de l’édition 2019 : É chos Ruraux , Betún et Nous étions debout et nous ne le savions pas .
Nous étions debout et nous ne le savions pas (Prix Coup de Cœur)
La pièce parle-t-elle plus de l’engagement ou des engagements ?
Pierre Lambert (metteur en scène) : Généralement, les artistes dits engagés, contrairement à un discours métaphysique, abordent des questions sociétales ou socio-politiques dans leurs oeuvres. En matière de théâtre on peut citer des auteurs comme Brecht, Sartre, Havel, Gattil… Les personnages de leur théâtre présentent l’homme dans des situations « en lien avec la réalité concrète » qu’elle soit familiale, professionnelle, sociale, politique… ce qui n’empêche pas une dimension poétique et complexe de ces personnages.
Avec les récits de Catherine Zambon réunis dans la pièce intitulée Nous étions debout et nous ne le savions pas , une série de personnages, interprétés par 5 comédiens, vient nous raconter tour à tour leur histoire. Ils s’interrogent sur le sens de leur vie dans notre société de consommation, tournée vers un matérialisme effréné et un individualisme qui ne l’est pas moins. Un jour « on ne sait pas toujours pourquoi », installés dans un travail ou une famille conformes, ils décident de se mettre en rupture et à la recherche d’un mode de vie qui leur convient mieux.
Ces choix difficiles nous les montrent en lutte pour un monde meilleur. Inévitablement confrontés à la réalité … doutes, chagrins mais aussi espoirs, rêves, utopies ne manquent pas de surgir… Cependant, confiants dans le pouvoir de la solidarité (« En s’organisant on est plus fort qu’un État tout entier ») et habités par un désir acharné de vivre, ils dégagent les prémisses d’un autre monde, chacun à leur manière. C’est en ce sens qu’il est possible d’affirmer que Catherine Zambon traite de l’engagement et que ses personnages témoignent d’engagements propres tout en étant solidaires de leurs amis et camarades.
Comment est née l’idée de cette pièce ?
Convaincu que la protection de la planète en ce 21e siècle est le défi majeur qui se présente à l’humanité, je cherchais sans succès depuis plusieurs années des textes qui me permettraient d’évoquer sur scène le sujet de l’éco-citoyenneté. Ces textes tant recherchés, je les ai trouvés avec les récits de Nous étions debout et nous ne le savions pas de Catherine Zambon. J’ai alors décidé de les mettre en scène avec le Théâtre de l’Espoir, compagnie domiciliée à Dijon et que je dirige depuis 35 ans. Tout naturellement en Avignon je me devais de présenter ce spectacle à Présence Pasteur que j’ai fondé en 1994.