critique &
création culturelle

Carnet d’Istanbul

rêve de jeux vidéo

Partis dix jours en Istanbul, Coline Sauvand et Laurent Toulouse ont pris – selon leurs propres mots – une claque. Une claque devenue le très beau carnet de voyage que vous avez découvert cette semaine dans la galerie de Karoo .

À première vue, s’inspirer d’un style persan pour représenter une ville ottomane peut surprendre…
Laurent Toulouse : En fait, non. À l’époque, c’était la Perse ! L’art ottoman médiéval, c’est de l’art perse. C’est une culture intimement liée à l’art du livre qui s’est développée autour du Coran et de l’écriture. La culture persane a profondément influencée cette partie du monde. Les miniatures persanes sont donc tout sauf incongrues dans un carnet de voyage stambouliote.

La claque dont vous avez parlé en arrivant à Istanbul, c’était quoi ?
C.S. : C’était la rencontre avec une mégalopole qu’on n’attendait pas. On s’attendait à voir des miniatures persanes dans des palais aux arabesques infinies, et on s’est retrouvé dans une ville grouillante, parfois très moderne et surtout très contrastée. Il y a souvent peu de distance entre la ville des touristes et celle des autochtones, familiale et modeste.

Carnet d’Istanbul, page 28.

C’est ce que vous retiendrez de la ville ?
C.S. : Oui, mais je pense que ce voyage était un prétexte pour traiter une thématique, celle des miniatures. Pour être honnête, je ne pense pas que ce voyage ait été aussi inspirant que la découverte des miniatures persanes sur Google Image !
L.T. : Dans le carnet, il y a quand même les croquis faits sur place.
C.S. : C’est vrai, d’ailleurs, le défi de Laurent était d’écrire des textes qui puissent faire le lien entre les croquis réalistes et le monde onirique des miniatures. C’est pour ça qu’on a imaginé que les personnages des carnets, nos homologues en fait, sous l’effet de la même claque que celle qu’on a vécue personnellement, s’endorment et rêvent leur voyage.

Le carnet se prolonge par une exposition.
C.S. : Il y a l’exposition à l’Espace Paul Delvaux à Watermael-Boitsfort dans le cadre d’Europalia Turkey. Elle sera suivie par une autre expo à Saint-Gilles 1 en janvier, elle-même accompagnée de notre projet actuel : un jeu vidéo.
L.T. : On avait envie de faire d’autres choses que des expos, alors on s’est dit : pourquoi pas un jeu vidéo ? Et en fait, c’était une super-idée. Sur l’aspect technique de la programmation, c’est vraiment comme un jeu vidéo avec un vrai gameplay , mais c’est réfléchi pour pouvoir l’exposer.
C.S. : C’est un espace labyrinthique à explorer, de pièce en pièce, dans lequel on peut se perdre.
L.T. : Comme dans la conception classique des jeux vidéo, le joueur est incarné par un personnage à l’écran qui se déplace dans les décors dessinés par Coline, des espaces irréels, aux perspectives déroutantes.
C.S. : Finalement, même si ça ne ressemble pas vraiment à Istanbul, on retrouve la ville dans ces miniatures. Notamment des choses très caractéristiques, des détails qui nous ont frappés à Istanbul et qu’on n’aurait pas pu sentir ou percevoir sans y avoir été. Ce qui fait dire à ceux qui connaissent Istanbul qu’on retrouve, malgré l’univers parfois surréaliste des miniatures, quelque chose de cette ville.

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