Échos des Songes. Le Symbolisme à Bruxelles
Plongée dans l’imaginaire symboliste au cœur d’un écrin Art nouveau

Depuis le 29 août, la Maison Hannon accueille Échos des Songes. Le Symbolisme à Bruxelles, une exposition à découvrir jusqu’au 19 avril 2026. Quoi de plus juste, en effet, que cette demeure au décor onirique pour déployer un mouvement qui a fait de l’imaginaire et de la spiritualité son terrain d’exploration ?
En réaction au réalisme triomphant de la fin du XIXe siècle, le symbolisme s’attache à ce que l’on ne voit pas : l’âme et les émotions. Drapés flottants, paysages irréels, visages mystérieux : tout semble indiquer un ailleurs qui surpasserait notre monde.
La scénographie de l’exposition Échos des Songes, découpée en cinq thématiques – Les rimes de joie, La tempête, Les passions humaines, L’école de Platon et Devant les étoiles – invite à traverser les multiples facettes de ce courant.
La maison Hannon comme écrin parfait
Dès l’entrée, les fresques murales de Paul Baudouin enveloppent le visiteur dans un univers de songes colorés. Vitraux, arabesques et ferronneries : les détails de l’architecture de Jules Brunfaut dialoguent avec les créations symbolistes. Le lieu est une œuvre en soi, un espace où le décor semble prolonger l'exposition.

Sur un mur, une citation de l’ancien propriétaire fustige « l’usine qui prend votre temps et vos forces… ». Elle rappelle que, face à l’industrialisation galopante de son époque, les artistes symbolistes proposaient une échappée afin de retrouver une poésie, une spiritualité et une douceur que la modernité semblait abolir.
Un peu plus loin, l’affiche du Salon des XX attire l’œil avec ses arabesques graphiques et sa typographie sinueuse. Elle témoigne de la volonté des artistes de créer une scène nouvelle, ouverte aux recherches les plus audacieuses, et rappelle combien Bruxelles était un foyer d’avant-garde.
Parmi les pièces phares de l'exposition, on trouve L’Ange des Splendeurs (1893) de Jean Delville, baigné de bleu, où se déploie une figure éthérée aux ailes immenses, presque translucides. Sa lumière froide a la force d’une apparition mystique qui nous happe dans cette réalité alternative.

Chez Fernand Khnopff, avec Acrasia (1893) et Britomart (1894), les visages vaporeux hypnotisent. Les personnages, très doux à la fois dans l'expression des visages mais aussi dans le traitement, incarnent cette volupté propre au symbolisme.

L’exposition n’oublie pas les arts décoratifs : le Vase aux hippocampes d’Émile Gallé, aux motifs marins ciselés dans la matière, évoque un monde aquatique entre rêve et réalité. Fragile et raffiné, il incarne l’idée d’un art total où les objets du quotidien deviennent supports de poésie.

Si le dialogue entre œuvres et architecture séduit d’emblée, les liens entre certaines pièces exposées du même thème restent parfois flous et on se surprend à être happé davantage par la maison que par l'exposition.
Néanmoins, le parcours a le mérite de montrer combien le symbolisme a infusé tous les médiums, de la toile monumentale aux objets domestiques. Et dans ce contraste entre l’ornement architectural foisonnant et l’absence de mobilier originel, l’exposition révèle aussi ce que pouvait être un intérieur bourgeois au tournant du XXe siècle.
Un art singulier qui dialogue encore avec nos inquiétudes contemporaines
Avec Échos des Songes, la Maison Hannon propose une expérience où architecture et œuvres se répondent, entre mystère, beauté et spiritualité. On en ressort comme suspendu, nourri par une atmosphère qui, plus d’un siècle après, n’a rien perdu de sa force évocatrice. En remettant en lumière le symbolisme, l’exposition met en avant un courant que l’on connaît mal, bien qu’il exprime déjà une lassitude face aux bouleversements sociaux de son temps. Une sensibilité qui trouve un écho dans nos propres inquiétudes.