Plan Cœur est une série française réalisée par Noémie Saglio et Julien Teisseire, diffusée via la plateforme de streaming Netflix et commandée par elle pour agrandir ses parts de marché en France. Décrivant la vie d’un groupe d’ami.e.s trentenaire, la série enchaîne situations improbables et dialogues crus. Et si vous ne voulez pas de spoilers, arrêtez-vous là…
La série s’inspire des rom-com anglo-saxonnes type Bridget Jones ou Coup de foudre à Notting Hills . Le personnage principal est une anti-héroïne maladroite, spontanée, un peu nunuche, qui boit trop, mange trop mais est tout de même époustouflante de beauté quand elle enlève ses lunettes. Les scénaristes sont en retard : Bridget Jones, c’était dans les années 90 et depuis, il me semble que le monde a réalisé que les femmes ne sortent pas du lit maquillées et font parfois des taches de gras sur leur pull. L’anti-héroïne, au lieu d’être « non-conforme » et attachante par son originalité, est en fait une fille très malheureuse qui a vraiment besoin d’un thérapeute.
En effet, Elsa, interprétée par Zita Hanrot, fait un boulot qui ne l’intéresse pas, vit chez son père et ne se remet pas de sa rupture avec son ex deux ans auparavant. Ses deux meilleures amies de toujours, Émilie, dite Milou, et Charlotte (interprétées respectivement par Joséphine Drai et Sabrina Ouazani), sont grosso modo le seul point positif de sa vie.
Comme dans toutes les rom-com qui se respectent, la solution pour Elsa n’est pas dans les anti-dépresseurs, la remise en question de sa trajectoire de vie, ou encore un appel à l’aide d’un professionnel de la santé mentale, mais bien un homme. Une petite touche contemporaine est tout de même apportée : cet homme ne sera pas censé être son futur mari et le père de ses enfants, mais seulement un très bon coup d’un soir afin de la remettre sur les rails.
Cet homme providentiel, c’est Jules. Jules est un travailleur du sexe payé par Charlotte pour rendre à Elsa sa libido et par là-même régler tous ses problèmes. On a tou.te.s vu Pretty Woman , on sait comment ça finit : le travailleur du sexe tombe amoureux de la belle, et vice-et-versa. Sauf qu’ici, Elsa ne sait pas que Jules est payé pour lui faire la cour, et elle n’a pas vraiment les moyens de l’entretenir. Cela finira-t-il bien ? Elsa reprendra-t-elle confiance en elle maintenant qu’un homme l’a regardée avec désir ? Pourra-t-elle pardonner ses amies et Jules une fois qu’elle apprendra la supercherie ? Jules quittera-t-il son métier pour vivre d’amour et d’eau fraîche ? Suspense…
Le scénario reprend quelques tendances clé qui pourraient sembler réjouissantes dans le paysage audiovisuel francophone, et sur lequel la bande-annonce repose. Un groupe de trois amies très soudées (#femalefriendship) qui ne correspondent pas au cliché de la féminité classique mais sont indépendantes et libérées (#strongwomen). Émilie, enceinte, cache à son mec qu’elle n’a pas pris de congé de maternité pour continuer à travailler en tant qu’architecte cheffe de chantier. Charlotte refuse la notion du couple et l’idée du CDI, enchaîne les petits boulots et les coups d’un soir avec bonheur.
Mais dès le premier épisode, tout ce beau programme s’écroule. Charlotte, à la manière d’une Samantha des dernières saisons de Sex and the city , trouve l’amour en la personne du meilleur ami de son frère. Cette relation tombe sous le coup du secret parce qu’une loi tacite mais apparement connue de tou.te.s interdit de toucher à la sœur d’un pote (les femmes étant la propriété des hommes de sa famille, probablement). Elle découvre dans la foulée que, si elle n’est pas faite pour le CDI, elle est faite pour… l’entreprenariat !! Elle trouve une idée révolutionnaire d’un service uber pour femmes ( pink cars ! Parce que les femmes adorent le rose !). Son nouvel amoureux la pousse à la mettre en pratique car lui-même a déjà fondé une boîte. Elle se met donc à potasser des bouquins de marketing et en deux semaines, l’affaire est dans le sac, elle trouve des fonds, toujours poussée par l’homme de sa vie. Macron nous l’avait dit : si vous voulez vous payer un costard, il suffit de traverser la rue et trouver du travail (ou un truc comme ça). Si vous êtes une femme, vous devez aussi vous appuyer sur un homme qui vous donnera confiance en vous, et le tour est joué !