Quand une soirée littéraire
Pour tous ceux qui se plaignent que les jeunes adolescents délaissent les bouquins au profit de jeux vidéo mettant en scène des meurtriers sanguinaires, voici un livre qui devrait vous intéresser. Cerise sur le gâteau, écrit par Frank Andriat, il permettra aussi aux jeunes lecteurs de faire une brève incursion sur le vaste et méconnu territoire de la littérature belge.
Invité par la bibliothèque communale, un célèbre auteur parisien revient dans sa petite ville natale afin de donner une conférence. Le public est en émoi et les bibliothécaires en effervescence. Et pourtant, lorsque le mari de la responsable de la bibliothèque, Damien, commissaire à la retraite, laisse brûler le gratin d’aubergine et que sa chasse d’eau se met à couler… l’organisation de la soirée semble se dérober. Alors lorsqu’un cadavre est retrouvé dans la salle des archives avec un manuscrit annoté et une somme importante d’argent à ses côtés, Damien est obligé de reprendre du service pour dénouer les fils de la mystérieuse affaire.
Mes anciens collègues ont permis au public de rentrer chez lui : les uns voulaient obtenir des détails sur ce qui s’était déroulé, les autres étaient profondément choqués, certains fâchés d’avoir fait tout ce trajet pour être renvoyés chez eux sans autre forme de procès. Personne n’imaginait qu’une soirée littéraire tournerait au drame. Tous rentraient chez eux avec une histoire sordide à raconter. Le maire a organisé un point presse avec les deux journalistes présents pour couvrir l’événement culturel qui s’était transformé en affaire judiciaire. Je suis sûr que, de dix lignes en bas de page, les faits feront l’objet d’un article en une avec interviews des personnes présentes. J’entends d’ici Judith râler : Norbert Juillet passera à la trappe au profit d’un crime crapuleux.
« Comme toujours, grognera-t-elle, la littérature est le parent pauvre des médias. »
Je ne pourrai pas lui donner tort. Norbert Juillet et les années de travail acharné que son œuvre représente seront gommés par un terrible fait divers auquel son passage dans notre petite ville sera pour toujours associé.
Dans Meurtre à la bibliothèque , Frank Andriat initie les jeunes adolescents au récit policier. Suspects, victime, mobile, alibi... tous les ingrédients du récit policier classique s’entrecroisent dans un habile chassé-croisé. Une victime mystérieuse au visage de séducteur prétentieux détesté par la plupart des membres de son équipe autant qu’il est aimé par d’autres. Des suspects dont la belle image qu’ils arborent se fissure au fur et à mesure de l’avancée de l’enquête. Un commissaire à la retraite qui est aussi un mari jaloux. Un autre commissaire qui est le père dévoué de l’une des employée de la bibliothèque. L’auteur jongle habilement avec les éléments du récit policier classique… et comme les plus grands classiques, détourne ceux-ci. Frank Andriat propose ainsi deux fins à son histoire : l’une morale, l’autre immorale. À chacun de choisir la sienne !
Grâce à son style fluide, sans fioritures mais efficace, ce récit est accessible à tous les jeunes lecteurs et devrait plaire à un grand nombre.