Pietro Pizzutti met en scène Marie-Paule Kumps et Bernard Cogniaux dans Constellations de Nick Payne qui raconte toutes les versions possibles d’une histoire d’amour entre une physicienne et un apiculteur. Un exercice de style subtil, drôle et poignant à voir à Bruxelles, au Théâtre le Public jusqu’au 20 juin.

© Andrea Messana
© Andrea Messana

Nick Payne est un jeune auteur dramatique né en 1984 qui, après avoir étudié la dramaturgie à New York et complété sa formation au Royal Court de Londres a démarré une carrière fulgurante au cours de laquelle il a créé autour de lui une sorte d’unanimité critique et publique. On le joue et on le récompense partout. Marie-Paule Kumps et Bernard Cogniaux ont vu Constellations à Londres en 2012 et n’ont eu de cesse de monter la pièce. Grâce une co-production du Théâtre de Namur et du Théâtre Le Public, c’est chose faite : après avoir été créée à Namur, on peut voir la pièce à Bruxelles jusqu’au 20 juin.

Constellations raconte une histoire d’amour de A à Z en tentant d’en épuiser les potentialités. Concrètement, chaque fois que l’histoire bifurque, plusieurs versions sont proposées aux spectateurs. Ces versions tiennent compte aussi bien de l’humeur ou de la disponibilité des protagonistes, que de leur humour ou de leur susceptibilité. Ce procédé narratif constitue tout à la fois l’originalité, la force et la faiblesse du spectacle. L’écriture est très subtile et l’issue d’une scène se joue parfois sur une intonation ou un geste bien ou mal interprété. C’est le côté jubilatoire du spectacle. Mais comme pour se déployer, les répétitions des scènes ou leur déclinaison sont indispensables, il y a des passages un peu longs surtout lorsque le procédé est bien assimilé par les spectateurs.

Les professions des deux personnages sont très signifiantes. Bernard est apiculteur. Il est fasciné par la vie dépourvue de toute improvisation des abeilles qu’il envie un peu. Marianne est chercheuse dans un laboratoire de physique. Elle étudie la mécanique quantique. Autant dire que ses préoccupations existentielles sont aux antipodes de celles de Bernard puisque, pour aller vite, la notion de probabilité et la question des univers parallèles sont au cœur de son travail.

© Andrea Messana
© Andrea Messana

Pietro Pizzuti signe la mise en scène du spectacle. On peut regretter que le dispositif apparaisse surtout comme une concession à la disposition de la salle des voûtes du Théâtre le Public. Les spectateurs encerclent l’air de jeu et assistent au spectacle avec un angle de vue réduit qui est plus inconfortable que significatif. Le melting pot sonore qui brasse les répliques de la séquence qui se termine et assure la transition avec la séquence suivante n’est pas très réussi. Un noir aurait suffi. Mais l’essentiel n’est pas là.

Le grand talent de Pizutti tient dans sa direction d’acteur et son travail est absolument remarquable.

Il faut dire qu’il dirige au millimètre un couple qui se connait sur le bout des doigts, à la scène comme à la ville. Et c’est savoureux. Bernard Cogniaux est constamment en décalage avec une situation qu’il subit la plupart du temps : pataud ou allumé, maladroit ou poétique. Sa composition fournit un contrepoint idéal à Marie-Paule Kumps dont la voix si particulière oscille entre la gouaille et la fragilité. Le spectacle est fin et drôle de bout en bout, même s’il est aussi très triste, mais c’est normal, puisque, comme le disaient les Rita Mitsouko, les histoires d’amour finissent mal, en général à moins que non.

http://www.theatrelepublic.be

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