@Anima2016
Du 5 au 14 février, le festival Anima, installé place Flagey, a mis à l’honneur l’animation sous toutes ses formes : courts et longs métrages, animation classique et expérimentale, grosses productions et œuvres plus intimistes.
Du 5 au 14 février, le festival Anima, installé place Flagey, a mis à l’honneur l’animation sous toutes ses formes : courts et longs métrages, animation classique et expérimentale, grosses productions et œuvres plus intimistes.
Deux rédacteurs de Karoo, Gaspard Breny et Bryan Schatteman, vous proposent un portrait robot de cette édition 2016 à travers une sélection de cinq films. Conclusion cette semaine avec Gaspard Breny, qui évoque
Miss Hokusai
de Keiichi Hara (2015).
Lire la
première
et la
deuxième partie
.
Vendredi, 21 h 30. Pour la dernière séance de la journée, les programmateurs ont porté leur choix sur
Miss Hokusaide Keiichi Hara. Il s’agit de l’adaptation du manga historique
Sarusuberide Hinako Sugiura, publié entre 1983 et 1987. Le film ressemble à une chronique historique du Japon du début du XIX
esiècle, articulée autour du célèbre peintre Katushika Hokusai (1760 ?-1849 ?) et de son entourage. Mais plus que sur l’artiste lui-même, le film se focalise sur ses rapports avec ses deux filles.
O-Ei, l’aînée, a choisi la peinture pour se rapprocher de son père et s’émanciper. Elle incarne ainsi la Miss Hokusai qui donne son titre au film. Aveugle de naissance, Koto, la cadette, est incapable de construire une relation normale avec son père.
Loin d’être pompeux et didactique,
Miss Hokusai
se présente comme une succession de tranches de vie, tour à tour drôle et touchante. Au-delà de l’étude des relations entre un père et sa fille, qui ressemble d’ailleurs à une relation de maître à élève, le film installe aussi une belle émotion dans les rapports entre les deux sœurs. L’affection mutuelle que développent les deux personnages transparaît surtout dans les scènes de promenade dans l’Edo du XIX
e
siècle1
. La grande sœur artiste tente alors de décrire le monde qui les entoure à cette petite sœur qui n’en a jamais vu la lumière. Que ce soit dans le tumulte d’une foule traversant un pont ou bien dans le silence d’une journée enneigée, la complicité qui unit les deux sœurs se dessine peu à peu, en quelques coups de pinceau.
Le film est aussi une réussite tant esthétique que technique. Il est dans l’air du temps, entre des décors somptueux et des personnages à l’animation irréprochable, respirant de vie et de densité. Mais son intérêt esthétique transparaît surtout dans les scènes où l’animation moderne se mêle aux estampes d’Hokusai. On pense notamment à ce moment où les deux sœurs, en promenade sur un bateau, se retrouvent au cœur de la célèbre toile la Grande Vague de Kanagawa , chef-d’œuvre de leur père.
Que dire aussi de la bande sonore, assez surprenante, qui oscille entre musique traditionnelle japonaise et riffs ravageurs de guitare électrique ? Elle sert systématiquement à marquer l’indépendance et la singularité de l’existence de Miss Hokusai dans une société très machiste et paternaliste.
Si l’on devait émettre un bémol, ce serait surtout pour reprocher au film son académisme. S’il est esthétiquement réussi, il lui manque ce petit quelque chose en plus, cette petite touche de folie qui l’aurait rendu vraiment unique. En mélangeant l’animation moderne et les estampes, Keiichi Hara tenait pourtant le bon bout. Mais l’idée n’est finalement exploitée que dans un nombre très réduit de scènes.