Deux anciens amants se retrouvent au milieu d’un cimetière et s’interrogent sur ce qu’ils ont vécu et ce qui leur reste à vivre… Rêve d’automne , mis en scène par Georges Lini au théâtre Le Rideau, met en lumière les regrets d’une vie, intense mais aussi parfois ennuyante.
Rêve d’automne s’ouvre sur une scène vide, le s spectateur · ices n’ont d’autre choix que de découvrir le sombre décor face à elleux. Leur regard est porté par un chant d’opéra et une lumière diffuse qui augmente peu à peu. Un sol jonché de terre et de feuilles mortes, cinq bancs en bois blanc délavé et des murs au papier peint déchiré, laissant entrevoir les années et les personnes que cette vieille maison a connues. Dès ces premières minutes, la scénographie, conçue par Thibaut De Coster et Charly Kleinermann, nous transporte et il paraît évidemment que l’on s’apprête à assister à un spectacle tout en noirceur.
Le protagoniste principal, interprété par Georges Lini qui assure également la mise en scène , met les pieds dans cette maison délabrée, entourant en réalité un cimetière. Très vite rejoint par un ancien amour (Isabelle Defossé) qui deviendra sa deuxième femme, ils vont à tour de rôle balayer, d’un revers de la main, la terre et les feuilles mortes pour laisser entrevoir plusieurs pierres tombales. Jouant à s’imaginer la vie qu’ont menée ces morts, ils nous font découvrir la relation qui les lie, les choix de vie qui les ont menés jusqu’ici.
C’est là que se trouve le cœur de Rêve d’automne : les choix de vie. Au moyen de dialogues fermés et répétitifs, Georges Lini et les mots de Jon Fosse nous plongent dans une contemplation des moments d’une vie, celle du protagoniste. Il revit les discussions, les conflits, les éclats de rire, les disputes qui ont marqué ses relations avec ses proches (son père, sa mère, son ex-femme, sa seconde épouse), comme dans une sorte de boucle infinie dont il ne peut sortir. Si ces répétitions peuvent par moment lasser le · la spectateur · ice, on ne peut nier qu’elles reflètent parfaitement le propos du spectacle : une fois les instants passés, on ne peut plus les altérer mais seulement les rejouer. Cette peur du temps qui passe se lit sur les visages des personnages. Oscillant entre euphorie brillante et colère obstinée, le jeu d’acteur laisse parfois peu de place à des émotions plus subtiles, ce qui donne finalement plus de poids aux quelques passages plus doux du spectacle, passages tout en sobriété où les personnages assis sur un banc tentent de discuter. Les mots des uns se heurtent aux mots des autres. La communication passe mal, parfois y compris avec le public qui peut avoir l’impression de voir les protagonistes s’exprimer face à un mur.
Rêve d’automne a cependant le mérite de pousser le·la spectateur·ice à interroger ses propres rapports à la vie, à la réalité et surtout à la mort. Face à cet objet artistique à la fois étrange, flou, sinistre, mélancolique, le public sort de la salle avec une phrase qui résonne dans la tête : il faut vivre avec les regrets mais il faut surtout mourir avec eux.