Un nageur est un cavalier
Un concentré de nuances
Un livre un extrait (19)
Nombreuses sont les nuances qui colorent l’essence de la poésie (révolte, expérimentation du langage…). Le texte Un nageur est un cavalier, de l’auteur belge Paul Snoek, en illustre quelques-unes parmi les plus importantes.
L’écrivain commence dans la première strophe par délivrer un autre regard sur la réalité et trouver les mots justes pour décrire une expérience subjective que d’autres êtres humains ont pu vivre également. Qui parmi nous ne s’est jamais senti « infiniment libre » en nageant ?
« Nager c’est dormir lascif dans de l’eau qui s’ébroue,
c’est aimer de chaque pore encore utile,
c’est être infiniment libre et triompher en dedans. »
Lire un poème, c’est aussi plonger dans le monde du mystère et du rêve. Ce haïku de Kôda Rohan en livre un bel exemple : « Au clair de lune // je laisse ma barque // pour entrer dans le ciel ». La deuxième strophe d’ Un nageur est un cavalier nous immerge à sa façon dans le mystère et le rêve, en évoquant la révélation par la nage de « secrets séculaires » à l’eau, vraie confidente.
« Et nager c’est tâter des doigts la solitude,
c’est raconter avec jambes et bras des secrets séculaires
à l’eau qui comprend toujours tout. »
La poésie permet également une prise de conscience qui rend possible une expérimentation neuve de certaines réalités. Martha Medeiros nous encourage ainsi dans La mort doucement à éviter la mort lente que constitue le fait de se plaindre quotidiennement de la malchance ou de la pluie incessante. En nous faisant prendre conscience que dans l’eau, on n’est jamais totalement seul tout en demeurant solitaire, Paul Snoek nous ouvre un chemin pour expérimenter de façon nouvelle la nage.
« Je dois avouer que je suis fou de l’eau.
Car dans l’eau je respire de l’eau, dans l’eau
je deviens un créateur qui enlace sa création,
et dans l’eau on ne peut jamais être tout à fait seul
tout en restant solitaire.
Nager c’est être un petit peu presque saint. »