critique &
création culturelle

L'année culturelle 2023

selon Jérôme Warichet

Pour Jérôme Warichet, ex-stagiaire Karoo et assistant communication, c’est le rap belge qui est mis à l’honneur cette année. Mais il n’oublie pas un détour par ses coups de cœur Netflix, et un album jazz pour sublimer le tout. Cette année, c’est toute l’équipe d’Indications et Karoo qui vous livre ses musts de 2023 !

 

La pluie (acte 1) de CRC

Septembre 2023, Crc, rappeur bruxellois du collectif Nups3e, sort son premier album en solo : La pluie (acte 1). Un album pluvieux et nostalgique mais retentissant par sa puissance musicale.

Ce premier projet place l'auditeur dans le public d'une pièce de théâtre, avec La gamberge d'un jeune rappeur, la recherche de l'essence de la réussite, dans le rap ou en amour comme sujet. Les deux thèmes ne cessent de se mêler et s'embrassent au rythme des guitares et de mélodies catchy/mélancoliques. En plus de la direction artistique approfondie sur l’album, plusieurs clips sont disponibles sur la chaîne youtube de l’artiste. Ces clips à la photographie aux petits oignons sont magnifiquement bien conçus, alliant acting et musique. Ces quelques réalisations aux airs de court métrage étayent magnifiquement bien l'univers du projet.

En plus de son timbre de voix particulier, des flows rap et des placements techniques. En plus des virtuose de compositions Viktor Pierard et Clément Kasili. Le rappeur s'accompagne également de la voix de Ana Diaz. Véritable album de mise en scène au mélange fort et passionné, parsemé d'interludes musicaux intriguants et de véritables performances d'acting, sa structure et son aura cinématographique très bien construites assurent un potentiel de réécoute hyper efficace. Bref, on attend impatiemment de connaître la suite.

Enfant soldat de Godson

Décidément, la scène rap belge crève le plafond de ma playlist Spotify en 2023. Godson, également rappeur du collectif Nups3, pose un projet de 11 morceaux coups de poing. Avec l'incontournable Anybody à la prod, Godson vient chercher l'auditeur en mélangeant des couplets trap ou chantés comme dans « cdlf » ou « glock » . Excellent shaker de confiance pour le matin ou pour bouger la tête en soirée, Godson sait varier les tons, les thèmes personnels ou provocants et dénonciateurs avec des mélodies trap et des prod minutieuses. Chaque production dégage une ambiance bien particulière toutes aussi impactantes les unes que les autres. Véritable démonstration de force et de souplesse musicale : ça sent bon pour la nouvelle génération rap bruxelloise.

Jazz is for ordinary people de Berlioz

On tourne la page rap pour cette année, avec 5 sons jazz parfaits pour se détendre au chaud chez soi. Berlioz jongle entre des phases de jazz saxophone, percussions et guitare, et des instruments aux sonorités plus exotiques. Les mélodies qui en résultent donnent une rondeur aux morceaux. Le ton est voluptueux et contrôlé mais donne tout de même une aura tamisée et planante. Mention spéciale pour « r&r », selon moi le meilleur morceau de Jazz is for ordinary people.

The Killer de David Fincher

David Fincher signe un excellent thriller avec son dernier film au casting haut de gamme (Tilda Swinton et Michael Fassbender). The Killer entre dans le top 5 de mes films préférés du réalisateur, en dessous de Fight Club, Gone Girl, Seven et The Girl with the Dragon Tattoo. Il y prend un sujet devenu aussi courant que le suivi d'un thriller, mais ce qui rend l'approche du tueur à gages convaincante c'est le paradoxe du personnel et de l'impersonnel. D'un côté le tueur fait son travail en soulignant son côté impersonnel et détaché mais bientôt, il doit s'occuper de sa propre survie. Une lutte contre son employeur et d'autres maillons de la chaîne criminelle, qui, une fois un contrat raté, se retourne contre lui. 

Avec sa division en chapitres et son narrateur interne, la proximité avec le tueur est mise au premier plan. D'abord effrayé par la froideur du personnage principal, le réalisateur nous fait rapidement changer de perspective. En nous plaçant aux côtés du tueur dès le début de l'intrigue, David Fincher arrive subtilement à nous faire participer à sa vendetta. Rendant sa cause notre, l'image du monstre dérangeant passe au second plan. Apparaît alors le visage d'un humain pour lequel on se met à développer de la compassion et dont la survie est notre principale appréhension.

David Fincher réussit à changer notre perspective et nous fait nous questionner sur nos convictions. Quelle est la distance qui nous sépare de ce tueur ? Si, en partageant sa vengeance, on participe à la survie d'un criminel, alors nous sommes complices.
La fin du film nous laisse seuls avec toute l'ambiguïté de notre positionnement : a-t-on sauvé la bonne personne ? Un très bon thriller particulièrement frappant par sa colorimétrie et sa mise en scène.

Blue Eye Samurai de Michael Green, Amber Noizumi

Inattendu mais grandiose, Blue Eye Samurai est une véritable toile de maître d’animation. Disponible sur Netflix depuis 2023, la série américaine à su convaincre le public et la presse par la qualité des animations et de sa narration. Des dessins magnifiques rendent les personnages et les environnements vibrant, qui mettent particulièrement à l’honneur les paysages du Japon sauvage de l'époque Edo. Une histoire engageante qui arrive à reprendre les codes du récit de vengeance à la Kill Bill ou Mulan mais à garder le subtil et l’histoire originale en développant des personnages secondaires et une distinction entre chaque épisode, tous importants et significatifs pour l’histoire. De plus, le casting 5 étoiles des doublages donne aux dessins une aura profonde et convaincante. On peut citer notamment un exceptionnel Randall Park, Georges Takei et Maya Erskine. Un succès éclair pour Blue Eye Samurai qui est déjà un incontournable.

Même rédacteur·ice :
Voir aussi...