La parole voyage. Elle est sans rivage. Elle a mille visages. Ceux d’ici, ceux de là-bas.

Mais où ici, où là-bas ?

L’Europe, l’Afrique.

L’homme à la caméra va voir.

Abdou est noir, couleur d’ébène, du Sénégal.

L’Afrique, l’Europe.

Paris, Dakar.

Dakar, Paris, etc.

Il interroge ceux qui sont partis, ceux qui sont restés, ceux qui sont revenus.

Les démarches pour obtenir des papiers, la lutte quotidienne, les obstacles, les déboires, la mort quelquefois.

Comment rester ? Comment rentrer ?

Un saxo tutoie l’écume, debout sur les rochers.

La musique emporte les mots comme la mer les pêcheurs.

Le vent souffle, l’homme respire…

Respirer, c’est juger, disait Camus.

Mais comment un poisson pourrait-il vivre hors de l’eau ?

C’est de cette apnée qu’il s’agit.

De ce déracinement.

Abdou arpente la nostalgie.

Et l’exil se retourne, leurs paroles nous abritent; soudain, une écoute nous visite par-delà les frontières.

Comment pourrions-nous nous dire libres, puisqu’ils ne le sont pas d’aller où ils veulent ?

Les paroles voyagent et questionnent nos rivages.

Qu’est, aujourd’hui, le visage de l’homme sinon celui du migrant ?

Quel est le cinéma sinon la conscience de migrer ?

Comment remettre nos montres à l’heure de la réalité ?

Migrants, migrer : pour que les esprits reviennent !