Accompagné de son acteur Pierre Deladonchamps, Christophe Honoré était à Bruxelles le 21 juin dernier pour présenter son dernier film, Plaire, aimer et courir vite , première projection en compétition internationale pour cette toute première édition du BRIFF.
Après avoir réalisé deux adaptations, Métamorphoses et les Malheurs de Sophie , il revient ici filmer dans le cadre Parisien qui lui est familier et auquel il nous a habitué notamment dans les Chansons d’amour , les Biens-Aimés ou encore Dans Paris . Ce Paris de Christophe Honoré est présenté d’une manière héritée de la Nouvelle Vague. On y retrouve les chambres parisiennes pleines de livres et le film est truffé de références, affiches, photos qui représentent toute une esthétique et une époque : Guibert, Truffaut, Campion, etc. Le verbe des acteurs est recherché, littéraire et presque théâtral sans pour autant sonner faux ou artificiel. Cette caractéristique ajoute un côté intemporel au style, et l’ensemble permet de construire un cadre qui peut sembler désuet, voire stéréotypé, mais néanmoins réconfortant pour les nostalgiques.
Plaire, aimer et courir vite , c’est une histoire d’amour homosexuelle entre Arthur, un jeune Breton rêveur qui aspire à devenir cinéaste (Vincent Lacoste), et Jacques, un auteur parisien pour qui la vie personnelle et professionnelle n’est pas très facile au moment de l’histoire (Pierre Deladonchamps). Le récit se déroule dans les années 90, en 1993 pour être précis, époque propre à la jeunesse du réalisateur dont plusieurs éléments le rapprochent d’ailleurs du personnage d’Arthur. Cette période est traversée par plusieurs problématiques et notamment celle du sida dans les milieux homosexuels. Ce sujet est évoqué avec finesse sans tomber dans le pathos et sans être redondant ; on pense à 120 battements par minute que Robin Campillo nous a présenté à Cannes l’année dernière.
Comme 120 BPM , le film a été réalisé en réaction aux mouvements contre l’homosexualité qui surviennent ces derniers temps et prennent de l’importance. Le réalisateur a avoué avoir considéré comme acquis le principe de liberté sexuelle et s’est véritablement posé des questions quand il s’est rendu compte que ce n’était pas encore le cas du tout. En tant qu’artiste, il invoque sa propre jeunesse et ses idoles pour faire de Plaire, aimer et courir vite un hymne très personnel à l’amour et à la liberté, qui reste néanmoins universel.
Le film nous raconte une tendre histoire d’amour entre deux individualités assez différentes mais touchantes. Le récit est véritablement portée par les comédiens et la mise en scène. Comme à son habitude, Christophe Honoré nous propose de jolis plans de lits (en soulignant d’ailleurs après la projection qu’il adore filmer des gens dans des lits) et rythme son film à l’aide de longues séquences uniquement musicales qui donnent une profondeur à tout le récit. Le répertoire est emblématique des années 90 et est particulièrement bien choisi, agréable et remarquable. Il souligne certaines scènes avec densité.
On peut citer par exemple les Gens qui doutent d’Anne Sylvestres accompagnant Jacques dans sa voiture et qui en fait un moment marquant du film. Le long-métrage alterne subtilement entre le drame et la comédie légère, entre la lassitude de Jacque et l’insouciance d’Arthur, au milieu desquels le personnage de Mathieu, voisin charismatique de Jacques (Denis Podalydès) apporte de la couleur et de la légèreté grâces aux situations comiques dans lesquelles il s’embarque.
Il est vrai qu’avec ses 2h12, le film peut parfois sembler long et l’esthétique maniérée et un peu stéréotypée de Christophe Honoré peut paraitre lourde et même agacer. Pour ma part, j’ai passé un très agréable moment, même s’il marquera moins ma mémoire que le percutant 120 battements par minutes de l’année dernière.
Brussels International Film Festival