La Décision - Les enfants du monde à venir
Quel lendemain construiront nos enfants ?
Dans La Décision - Les enfants du monde à venir, Vincent Hennebicq met en scène dix enfants face aux urgences de notre monde actuel. Bien qu’écrit au futur, ce spectacle désarmant, représenté au Théâtre National du 3 au 7 octobre, questionne ce qui est au cœur même de notre présent.
La Décision est le témoignage touchant du quotidien futuriste de dix enfants âgés entre 9 et 12 ans. Ceux-ci vivent dans un espace restreint, à l’allure d’un bunker ou d’un préfabriqué, avec comme seul référent parental un humanoïde. À l’image d’un cocon, ils y vivent à l’abri du monde extérieur, désormais radicalement abîmé.
Dans cette histoire se situant en 2081, le monde est apocalyptique : les mouvements migratoires ont conduit à des guerres interminables, la planète s’est asséchée, les serveurs automatiques sont remplis et la race humaine encline à l’extinction.
Cette sombre représentation ne parvient aux spectateurices qu’à travers le discours de l’humanoïde et des capsules vidéo émouvantes des enfants ou des parents démunis, projetées sur un écran. La pièce se termine d’ailleurs sur une fin ouverte : une porte s’ouvre, une lumière vive inonde la scène et les enfants, hésitants, empruntent ce chemin vers un nouvel espace indéterminé. Cette fin, qu’importe ce que l’on y projette, est angoissante.
L’univers est celui d’un film de science-fiction : l’espace scénique est aéré, épuré et, avant tout, fonctionnel. Le décor est entièrement blanc et caractérisé par des lignes droites, géométriques. Les personnages sont tous vêtus de combinaisons blanches, ce qui contraste avec le rouge vif qu’ils portent au pied. En plus de la présence de l’humanoïde, ce décor renvoie directement les spectateurices à l’imaginaire froid et inhospitalier des films du genre.
Toutefois, l’humanoïde, bien que renvoyant l’image d’un être détaché et contrôlant, n’est pas déshumanisé : il entretient un lien pédagogique, complice et protecteur avec le groupe. Ce qui se déroule entre ces quatre murs est souvent poignant : au milieu de cet univers de glace, la spontanéité des enfants anime et rend chaleureux ce lieu de vie, tandis que l’insouciance de leurs répliques questionne la notion d’humanité. C’était quoi être « humain » avant ?, c’est quoi l’être maintenant ?, et surtout, comment décliner ce mot au futur ?
Le spectacle est marqué par un évènement bouleversant : le dysfonctionnement fatal de l’humanoïde. Avant sa mise en arrêt, on assiste à l’éducation des enfants, notamment l’apprentissage de la musique : sur scène, les enfants jouent des instruments à cordes et à vent. En plus de signifier la recherche d’une harmonie, les mélodies soulignent le paradoxe qui traverse tout le spectacle : l’insouciance des enfants coexistant avec la gravité du monde dans lequel ils vivent.
Dans un second temps, ceux-ci sont complètement livrés à eux-mêmes. Le spectacle interroge le rapport à l’enfance face aux urgences de notre monde : quelle place lui donner ?, quelles responsabilités porte-t-elle sur ses épaules ?, comment peut-elle survivre, être préservée ?, quelles sont ses ressources ? Autant de réflexions qui sont soulevées et qui abandonnent, dans l’esprit des spectateurices, des questions existentielles.
La Décision - Les enfants du monde à venir propulse le public dans une vision du monde futur, à la fois sombre et touchante : il y a, d’un côté, l’insouciance des enfants et leur recherche d’harmonie et, de l’autre côté, la lourdeur du propos et la fatalité selon laquelle le monde est envisagé. Ce spectacle, déconcertant et alarmant, se jouera le 18 octobre à la Maison de la Culture de Tournai et du 15 au 18 novembre au Théâtre de Namur.