critique &
création culturelle

Lolo Zouaï au Botanique

chroniques rétro-futuristes

Ce 19 mars, la chanteuse franco-algérienne Lolo Zouaï était de retour à l’Orangerie pour défendre son second album PLAYGIRL devant une salle enthousiaste. En conservant ses influences initiales, l’artiste s’est montrée sous un jour futuriste et plus travaillé, plein de couleurs, de fun et de références cyber.

Une crise sanitaire et une tournée aux États-Unis avec Dua Lipa plus tard, Lolo Zouaï a bien évolué et dévoile, avec PL4YGIRL, un univers plus ambitieux et assumé. Au menu, un album concept des plus léchés se déroulant dans un cyber futur lointain dont la musique est divisée en trois personnages distincts : la séductrice Playgirl , la plus douce Dreamgirl et la plus sombre Partygirl . Sorti du four en octobre dernier, ce projet a mijoté pendant près de quatre ans. Un temps nécessaire à l’interprète de Desert Rose pour revenir avec une proposition pour le moins alléchante. Retour sur une soirée au Botanique aux petits oignons, truffée de surprises et de (re)découvertes.

Mise en bouche

C'est avec une excitation non dissimulée que je me rends au Botanique un dimanche soir. L’hiver touche à sa fin, c’est mon premier concert de l’année et il s'agit d'une artiste que j’affectionne particulièrement. Son dernier opus, qui, comparé au premier, n’a pas été un coup de foudre instantané, s’est frayé un chemin vers mon cœur au fil des mois. Délicat et entraînant, mêlant pop futuriste, R&B et influences des années 2000, ce projet marque un tournant dans l’attitude de la chanteuse. Exit la mélancolie, Lolo Zouaï a soif de légèreté et veut s’amuser davantage (ça tombe bien, moi aussi).

La première partie du concert est assurée par Eugénie , nouvelle figure du paysage musical français. La présentation est soignée : chevelure rouge flamboyante et un look au croisement entre Caroline Polachek et FKA Twigs. Elle ouvre le bal avec un presque acapella s’aidant de peu, voire pas du tout d’instruments, avec pour seul accompagnement un effet sur sa voix. Très à l’aise vocalement, la chanteuse réussit à nous captiver sans peine et livre des morceaux forts, tantôt en français, tantôt en anglais, faisant écho en chacun·e d’entre nous. Sa jolie performance se termine sur le dansant « 4D », un morceau électro-pop qui fait grimper la température de la salle, juste ce qu’il faut pour nous mettre en appétit.

Plat de résistance

Il est environ 21h quand les lumières de l’Orangerie s'éteignent pour laisser place au spectacle.
« Activating all playgirls » annonce Lolo Zouaï en assistante vocale pendant que les néons roses, verts et bleus se mettent à vibrer au rythme de ses vocalises robotisées. Petit à petit, la scénographie se dessine un peu mieux : un écran s’allume et fait défiler les trois personnages comme au début d’un jeu vidéo. Puis, la chanteuse apparaît enfin dans la cabine transparente qui trône au centre de la scène. Accompagnée pour cette tournée par deux musiciens, elle entonne « pl4yg1rl » et se lance dans un show généreux et plein d’énergie contagieuse.

Picorant dans son répertoire, la chanteuse offre une prestation alternant morceaux mélancoliques tels que « VHS » et « Tamagotchi » ‒ véritables odes à l’enfance des 90’s ‒ et d’autres plus légers et entraînants comme « Gummy bear » ou « Picking Berries ». Aussi, avec ce nouvel univers, l'interprète s’assume davantage et n’hésite pas à se déhancher avec grâce sur des chansons sensuelles parlant de désir. Le public se délecte et s’amuse de voir défiler tour à tour ces personnages dans une ambiance survoltée. Car ce concert n’est autre que le terrain de jeu des alters rétro-futuristes de l’album, prenant vie sur scène et auxquelles chacun·e d’entre nous peut s’identifier. Il faut dire que sa marque de fabrique bilingual est une recette efficace. Entre deux anecdotes personnelles et quelques clins d'œil aux tubes qui l'ont fait connaître, elle continue de charmer le public qui en redemande. Après tout, un tel spectacle, ça se mange sans faim.

Dessert

Alors que se termine « Skin & Bones », chanson introspective et sensible, les lumières changent brusquement et un logo qui m’est familier apparaît sur l’écran. Avant que je parvienne à le replacer, Lous and the Yakuza se révèle au public, bientôt rejointe par Lolo pour le morceau « Dilemme ». Surprise des cheffes, nouveau personnage débloqué, public en délire : personne ne l’avait vu venir mais c’est une réussite totale. L’énergie qui se dégage du public est puissante et, malgré la fatigue, nous donnons tout pour faire honneur au clou du spectacle, « Free Trial ». À mi-chemin entre combativité et vulnérabilité, cette soirée nous aura fait voyager grâce à une palette de sons et d’émotions riches.
Je quitte le Botanique comme on sort de table après un bon repas : rassasiée, bienheureuse et prête à rejoindre les bras de Morphée pour de doux songes, où comme dans le monde rétro-futuriste de Lolo Zouaï, je m’autoriserais peut-être à vivre sans crainte.

Même rédacteur·ice :

PLAYGIRL
Lolo Zouaï
Keep It On The Lolo / RCA Records, 2022
38 minutes