Subvenir aux miracles , petit livre écrit par Victoire de Changy , nous emmène, à partir d’une robe de mariée du musée des confluences à Lyon, dans une réflexion intéressante sur nos vêtements, ceux de cérémonie comme ceux du quotidien, qui nous accompagnent et nous complètent.
Le musée des confluences de Lyon s’allie avec les éditions Cambourakis pour offrir un récit d’objets inédit grâce à la plume de Victoire de Changy. Bruxelloise, l’autrice a déjà publié deux romans : Une dose de douleur nécessaire (2017) et L’île longue (2018). Elle écrit également de la poésie, notamment un recueil publié aux éditions L’Arbre de Diane en 2020 : La Paume plus grande que toi . L’autrice est d’ailleurs aussi connue pour ses albums jeunesses illustrés par Marine Schneider : L’Ours Kintsugi (finaliste du prix Sorcières) et Le Bison Non-Non . Dans ce nouveau texte intitulé Subvenir aux miracles , elle nous parle de sa robe de mariée, oubliée au fond d’une armoire, pour ensuite ouvrir et développer sa réflexion autour des vêtements. L’autrice s’attarde aussi sur une robe de mariée originale du musée des confluences : la robe de Mongi Guibane. Faite de soie et de fibres optiques, elle a la particularité d’être lumineuse. Victoire de Changy ne se contente alors pas de décrire cette robe mais l’utilise comme point d’appui pour emmener son récit là où elle le désire. L’intérêt immédiat qui se dégage du récit semble être cette multiplication de points de vue. En effet, l’autrice ne se contente pas de présenter le sien mais pioche autour d’elle pour le développer. C’est au travers diverses opinions récoltées auprès de ses amis ou trouvées dans les livres qu’elle nous offre sa vision du vêtement, de simple couverture pour se chauffer à véritable signifiant au sein de la communauté. Ainsi, le lecteur peut s’ouvrir petit à petit au texte et aux réflexions de l’autrice, et prendre le temps comme elle de s’intéresser enfin à ce que le vêtement signifie.
À cheval entre l’essai et le texte poétique, ce court récit nous pousse à la réflexion. Via plusieurs citations marquantes, des faits historiques intéressants ou encore des anecdotes sympathiques ponctuant le texte, il offre un doux mélange de beauté et d’intelligence. La lecture est agréable, facile et rapide en seulement 96 pages. La plume est limpide et, sans lourdeur aucune, révèle une forme de grande poésie. Avec un vocabulaire simple et une certaine élégance pour présenter des débuts de réflexions profondes, le texte est une perle qui sort même de l’ordinaire. Nous sommes loin ici d’une simple présentation des pièces d’un musée, avec photos et descriptions. Le texte au contraire reste assez peu de temps centré sur le musée pour partir rapidement vers la soif de savoir que celui-ci peut faire naître. Après avoir observé la robe de mariée de Mongi Guibane , on se surprend à vouloir en découvrir plus. Le texte nous offre cela en entamant avec nous une réflexion sur le vêtement et un début de recherche sur ce qu’il peut bien signifier. Victoire de Changy découpe son texte en différents petits morceaux qui, malgré le peu de liens qu’ils révèlent entre eux, ne nous perdent pas et nous emmènent avec eux dans le récit. Le lecteur pris au jeu parviendra sans peine à suivre le fil.
L’autrice crée également un lien intéressant entre texte et textile, lie le tissu au récit qu’elle compose et présente avec sens son œuvre comme un tissage de mots. Finalement, ce joli projet est pertinent pour démarrer une réflexion sur le vêtement, ouvrir son esprit à son existence, à sa présence, son importance, son rôle et celui de la mode. Bien sûr, cette initiation ne permet que de réveiller une faim que le lecteur, ou même le visiteur du musée, ne soupçonnait pas. Il faudra alors approfondir chacune des idées proposées par l’autrice qui, même si elles sont captivantes, ne peuvent avoir le temps de s’ouvrir et de se révéler dans leur entièreté. Après avoir découvert ce petit texte charmant, il me tarde de lire les romans de l’autrice qui semblent promis à une belle forme de poésie.
Subvenir aux miracles se lira sans même avoir eu la chance de visiter le musée de Lyon. En effet, si le musée et le texte se complètent, ils ne sont pourtant pas inséparables. Dès lors, ce texte pourra sans peine prendre vie par lui-même.