Cyrille, agriculteur, 30 ans, 20 vaches, du lait, du beurre, des dettes
« Je suis tout seul à bosser comme un con »
Le festival Alimenterre, organisé par l’ONG SOS Faim Belgique , cherche depuis douze ans à sensibiliser le monde aux questions d'alimentation et d'agriculture. Alimenterre fait notamment le constat paradoxal que beaucoup d'agriculteur souffrent de la faim, d'où la projection du documentaire Cyrille, agriculteur, 30 ans, 20 vaches, du lait, du beurre, des dettes , portrait sans commentaire d’un jeune agriculteur laitier en Auvergne qui ne sait plus faire face aux dettes qu’il a engrangé. Il travaille 365 jours sur l’année, mais cela n’est pas suffisant pour survivre.
Un agriculteur se suicide tous les deux jours en France . Ç a fait froid dans le dos. Bien que cette statistique omette d’expliquer la cause de l’omniprésence du suicide chez les agriculteurs, nous savons tous de loin de quoi il en ressort. En Belgique, et en Wallonie particulièrement, les images choc d’il y a onze ans de milliers de litres de lait répandus sur les champs sont restées en mémoire. En 2009, des agriculteurs avaient en effet protesté contre le prix dérisoire du lait et avaient donc à contrecœur déversé leur production laitière sur les champs, plutôt que de la vendre à un prix ridicule.
Cette problématique ne nous est donc pas étrangère, mais Rodolphe Marconi, réalisateur du documentaire, précise encore le tableau en filmant la vie quotidienne de Cyrille, jeune agriculteur français. Marconi filme Cyrille du levé au couché, et par son documentaire, nous sommes témoin de la traite des vaches, de l’entretien des étables, du pâturage, de la fabrication du beurre, de la vente sur le marché que Cyrille effectue lui-même, et bien d’autres tâches encore. En plus de ce dur labeur, Cyrille doit gérer les dettes qui s’accumulent, et en conséquence sacrifier sa vie privée et sentimentale qui devient presque inexistante.
Très peu de mots sont échangés dans ce documentaire, reflétant le quotidien de Cyrille qui travaille majoritairement en compagnie de ses vaches et de son chien. La voix off intervient au début, pour expliquer la rencontre entre le réalisateur et l’agriculteur, mais pour le reste du film, la caméra suit Cyrille, seul commentateur de sa vie. Pas besoin de mots pour expliquer que Cyrille aime son travail et ses vaches, mais qu’il est devenu impossible pour lui de l’exercer sans que toute sa vie ne s’écroule en même temps.
Marconi fait le parti pris de ne pas commenter les causes économiques et politiques de la situation de Cyrille et des agriculteurs aujourd'hui. Il fait plutôt appel à notre empathie en nous montrant le lourd quotidien de Cyrille, mais sans pathos, car les images parlent d’elles-mêmes. Pour un film programmé dans le cadre d’un festival qui cherche à sensibiliser les gens sur l’agriculture, c’est un bon départ, mais il manque néanmoins quelques explications, probablement fournies dans le débat suivant la projection du film le 10 octobre.