Le Journal de Samuel
Vous reprendrez bien un peu d’enfance ?

Un gamin amoureux qui se confie à son journal, ça donne Le Journal de Samuel de la Française Emilie Tronche, une BD qui est d’abord une série Arte à succès (produite par Les Valseurs), aussi déclinée en petits clips sur les réseaux. Candide, poétique, drôle : pas étonnant que la série ait atteint 50 millions de vues. Et c'est tout aussi jouissif en bande dessinée. Avec un dessin minimaliste mais néanmoins très expressif, Emilie Tronche nous emporte dans l’enfance avec une grande aisance et une fausse simplicité.
C’est presque le printemps, Samuel a dix ans, il sort son journal parce qu’il a un problème et qu’il ne veut pas en parler. Alors il écrit. Il raconte qu’il est amoureux de la grande Julie, que Basile a été rapporter, qu’il déteste Basile. Personne ne doit savoir pour Julie, pas même Corentin. Corentin, c’est son meilleur ami, précise-t-il. Il aime la grande Julie parce qu’elle a rigolé à une de ses blagues l’autre jour. Dans la vie, il trouve qu’il y a plus de choses négatives que de choses positives. Liste de choses négatives : la pluie, les devoirs, la mort, les gens qu’il n’aime pas. Liste de choses positives : le soleil, l’ordinateur, la guérison. CQFD.
Samuel est un enfant des années 2000 comme sa créatrice (quelques références, entre Zidane et Diddl, permettent d'ancrer son histoire dans le temps). Le journal qu’il utilise pour raconter ce qui le questionne est le prétexte du récit. De là se racontent les amours, les rivalités, les amitiés à l’école. Les petits soucis et les petites joies. Le Journal de Samuel suit assez fidèlement la série Arte (où c’est l’autrice-même qui par sa voix incarne Samuel) à ceci près que quelques passages ne figurent pas dans le livre.

À l'aide d'un trait noir minimaliste mais expressif, Emilie Tronche dessine Samuel et ses camardes avec des grands yeux un peu extraterrestres, et les tableaux de l’enfance sont rejoués avec beaucoup de réalisme, de poésie et de drôlerie. Très douée pour dessiner le mouvement, les petits pas de danse que fait Samuel sont très justes, à la manière un peu aléatoire et unique qu’ont les enfants de bouger, ce qui rend le personnage attachant. L’autrice s’est d’ailleurs filmée chez elle pour calquer ses mouvements sur ceux de ses personnages.

Le Journal de Samuel rejoint directement mes coups de cœur du moment, pour sa fausse simplicité et sa justesse dans la représentation des sentiments et des interactions humaines (et ici particulièrement quand il s’agit de dessiner l’enfance), mais aussi pour l’utilisation du mouvement, de la chanson, qui insuffle à cet histoire une certaine joie de vivre saupoudrée d’un peu de pathos, qui fait sourire, qui attendrit, qui fait du bien.