Trois Histoires
Coetzee, Karoo et son Nobel…
Un livre un extrait (6)
Un livre, un extrait, un commentaire : Karoo vous propose un autre regard sur les livres ! Aujourd’hui, Trois Histoires de J. M. Coetzee.
Il pensait que c’était un cercle, un cercle où les fées venaient danser la nuit à la lumière des petites baguettes scintillantes qu’elles arboraient dans ses livres d’images, ou peut-être à la lumière des vers luisants. Mais dans les livres d’images il s’agissait toujours d’une clairière dans la forêt. Or il n’y avait dans le Karoo ni forêt, ni vallon, ni vers luisants ; y avait-il même des fées ? À quoi pouvaient bien s’occuper les fées pendant la journée, dans la chaleur suffocante de l’été, trop torride pour la danse, alors que les lézards eux-mêmes cherchaient refuge sous les pierres ? Les fées étaient-elles assez futées pour se cacher elles aussi sous les pierres, ou bien gisaient-elles haletantes parmi les épineux, rêvant d’Angleterre ?
Le Karoo est au cœur de l’un des trois textes qui composent la dernière parution de J. M. Coetzee au Seuil. Le désert sud-africain auquel cette plateforme a emprunté son nom, via un détour orchestré par Steve Tesich , symbolise ici une désolation qui touche tout un pays et les âmes qui errent à sa surface. Coetzee ne se révèle pas plus optimiste qu’à son habitude et, pour le dire franchement, on aurait tôt fait d’oublier ce bref recueil si, justement, il ne se prêtait pas à ce rapide clin d’œil au pays de la soif qui nous est cher.
Double clin d’œil d’ailleurs, comme ceux que l’on fait aux enfants, croyant toujours être les premiers à réaliser cet exploit devant eux : la troisième de ces histoires est en fait le discours que lut Coetzee à l’occasion de la réception de son prix Nobel de littérature en 2003. Voilà qui nous renvoie à une anecdote réjouissante de l’histoire de Karoo . Ou plutôt de la revue Indications qui donna naissance à Karoo … C’était très peu de choses, mais l’équipe d’alors s’en réjouit : le Monde diplomatique , illustre confrère apprécié, nous contacta pour obtenir les droits de publication d’un article consacré à Coetzee que nous avions publié auparavant. L’article était signé par Laure-Élisabeth Lorent qui, de son côté, ne s’en émut pas vraiment. Et c’est ainsi que cet article introduisit la première parution en français du discours suédois de Coetzee…