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Bota(chro)nique

Toutes les couleurs du rock

Du 25 avril au 12 mai, le Botanique accueillait une nouvelle édition des Nuits , entre nouveautés, re-découvertes et release parties. Ce 3 mai, le chapiteau faisait briller l’indie rock grâce à un triptyque belge de qualité : Soror, Ada Oda et The Haunted Youth.

Soror

19h environ et il fait encore bien clair dehors lorsque Soror doit ouvrir les hostilités. Le public, aussi timide que le soleil à Bruxelles ces temps-ci, ne se presse pas particulièrement pour découvrir le premier acte. Qu’à cela ne tienne, Soror entamera sa prestation devant une foule quelque peu tiède.
Né de la rencontre entre Sophie, bassiste passionnée de rock, et Alice bercée au R&B et au trip-hop des années 90, le groupe est ensuite complété par Thibault et Théo respectivement à la guitare et la batterie. Sur scène, les lauréats de Court-Circuit parviennent à créer une osmose musicale plutôt réussie grâce à une basse envoûtante et la voix parfaitement cassée de la chanteuse. Ainsi, les chansons s'enchaînent sans trop de fioritures (et de contact avec le public). Malgré la qualité de la proposition, je resterai sur ma faim et l’envol tant attendu ne se fera que sur dernier morceau « Shadow of a Doubt », dont le solo de batterie et la ritournelle “this is the end” résonneront bien longtemps dans ma tête.

Ada Oda

20h et quelques, loin d’être rassasiée, je trépigne d’impatience pour le second volet de la soirée. Ayant déjà vu, et adoré, le groupe en novembre dernier, on peut dire que j’attends Ada Oda au tournant. La formation naît à l’initiative de César Laloux (Italian Boyfriend et Mortalcombat) en quête d’inspiration et d’une nouvelle voix pour un projet musical ; son choix se portera sur Victoria Barracato. Rencontrés sur Tinder, ils ne se marièrent pas mais firent un super groupe. Textes en italien et productions naïves rappelant Le Tigre et Wet Leg, voici le fond de commerce d’un groupe qui ne se prend pas le chou.

Les premières notes du tube « Niente da offrire », tiré de leur premier album Un Amore Debole , déchaînent le public et envoient un message clair : ici, on s’amuse. Eh bien, c’est noté ! On se dégourdit les jambes avec joie dans une foule bien réveillée grâce à un set qui n’a pas peur des imperfections et de (nous faire) mouiller le maillot. Pas de doute, les faux ritals ont largement honoré le contrat à grands renforts de riffs puissants, un charisme un peu gauche et une énergie contagieuse.

The Haunted Youth

Après un entracte qui me parait interminable, je me hisse à l’avant-centre de la foule où l'excitation est plus palpable que jamais. En à peine deux ans, The Haunted Youth est parvenu à créer une émulation impressionnante et a déjà la cote de l’autre côté de l’Atlantique ( yes sir ). Mélodies lumineuses et parts d'ombre font les beaux jours du shoegaze grâce au groupe venu tout droit de Hasselt.

Sur scène, le batteur Nick Caers, le guitariste Tom Stockx et le bassiste Stef Castro ouvrent la marche, un brin nonchalants. Joachim Liebens, reconnaissable à sa chevelure blond peroxydé, suivi par la claviériste Hanne Smets, font ensuite leur entrée sur scène sous les cris et les applaudissements d’un public déjà enjoué.

The Haunted Youth aux Nuits Botanique, le 03 mai 2023 © Cédric Depraetere

L’envol est doux ; « Dawn of the Freak » puis « Broken » emportent l’auditoire dans une mélancolie radieuse. Le groupe alterne ensuite entre ses différents projets, allant du rugueux « Gone » au plus retenu « Shadows », sans oublier l’inattendue cover de « Walking on a Dream » d‘Empire of the Sun. Tout y est : les sonorités brumeuses, la batterie entraînante, le charisme et les quelques pas de danse dont le frontman gratifie le public, la larmiche qui pointe le bout de son nez à l’écoute de « Stranger »…

Le groupe terminera son odyssée musicale avec « Coming Home », morceau apothéotique marqué par un beau final en deux temps, avant de faire redescendre l'émotion sur un sautillant « Since U Been Gone ». Je repartirai de cette soirée heureuse et très émue. Intimement convaincue que la scène indé ne finira jamais de nous surprendre, tant sa vitalité et son éclectisme en font une source quasiment intarissable.

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